La rétrogradation de la note de la dette américaine par Standard & Poor's a plongé les Bourses, dès le lendemain, dans un précipice. Tout au long de la semaine, les cours n'ont pas pu revenir à un niveau de stabilité. Républicains et démocrates, qui avaient du mal à trouver un compromis, ont donné l'occasion à l'agence de notation Standard & Poor's de rétrograder la note de la dette américaine du triple A au AA+. Eric Pichet, expert financier, nous affirmait dans un entretien que «ce n'est pas la faute à S&P si les pouvoirs publics états-uniens ne se sont pas mis d'accord». En perdurant le suspense, les marchés sont entrés dans une phase de turbulences. «La rétrogradation de la note est la goutte qui a fait déborder le vase», soutenait de son côté Lies Kerrar, économiste et président d'Humilis. A ce jour, les agences de notation travaillent d'une manière occulte. Leurs dirigeants, comme David Beers de S&P, affirment ne pas dévoiler la liste composant le comité de notation pour protéger les membres des pressions gouvernementales. Pour Henri Sterdyniak, économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques, «les agences de notation ont un pouvoir important. Quand elles dégradent la note d'un pays, ce dernier a du mal à émettre des titres et doit des taux d'intérêt plus élevés». De son côté, Pierre Gillet, enseignant chercheur à l'université Paris Sud, estime que «S&P n'a fait que constater une réalité». La dégradation de la note de la dette américaine répond donc, pour lui, à une logique. Cependant, pour l'économiste Frédéric Lordon, «Standard & Poor's, Moody's et Fitch ne font plus d'analyse financière, mais bien de la politique». La dégradation de la note américaine du AAA au AA+ a non seulement perturbé les cours boursiers au lendemain de leur ouverture lundi matin, mais donné naissance à une nouvelle période d'animosité pour les investisseurs. «Les Etats sont extrêmement endettés et la très faible croissance remet en cause la possibilité pour ces Etats de rembourser capital et intérêts en temps et heure. S'il devient plus risqué d'investir dans la dette américaine, il le devient beaucoup plus en investissant dans les autres types de placement, et en particulier en actions», nous explique Pierre Gillet. Le professeur d'économie à l'université de Rennes, Franck Moraux, affirmait que «le rôle et l'influence des agences sur les cotations du marché sont largement surestimés». Il estime sur le même point que «malgré la dégradation de la note, des liquidités se sont retirées des marchés des actions pour notamment se positionner sur le marché obligataire. Cette demande en obligations de long terme a jusqu'à maintenant maintenu les prix à de très bons niveaux de valorisation, les taux de rendement ont même baissé. Elle prouve que les investisseurs maintiennent leur confiance dans les USA». Les pays de l'Union européenne ont dû revoir leurs perspectives et préparer un plan pour contrer la crise actuelle. A commencer par l'éventuelle adoption de l'interdiction des ventes à découvert. Hier, les discussions étaient en cours à Bruxelles pour évoquer cette question. Chantal Hugues, porte-parole du commissaire aux services financiers, a indiqué que cette décision a pour but de «réduire les risques et éviter la fragmentation des marchés». Sur ce point, Henri Sterdyniak nous explique que «les traders gagnent de l'argent au détriment de leurs clients, en organisant la volatilité, en faisant courir des rumeurs et en envisageant des scénarios improbables». En clair, la tempête financière d'aujourd'hui démontre l'incapacité de la doctrine néolibérale à résoudre les problèmes qu'elle a elle-même créés.