Le phénomène de la profanation des tombes dans la wilaya de Béjaïa n'est apparemment pas près de cesser ; bien au contraire, il prend de l'ampleur en ce mois de Ramadhan. Les profanateurs ont sévi cette fois à Tiliouacadi, un village de la commune de Souk Oufella, à une soixantaine de kilomètres à l'ouest de Béjaïa. Ils se sont introduits de nuit, comme de coutume, dans le cimetière situé en contrebas de ce paisible village ; ils y ont mis à terre quelque 150 plaques épitaphes en marbre, que l'on appelle ici «ch'houd», pour dire leur désapprobation de voir des tombes construites et surélevées. Cent cinquante tombes ont été ainsi profanées dans la nuit de mercredi à jeudi derniers, plongeant dans le désarroi la population qui ne s'attendait pas à vivre un tel sacrilège. D'aucuns pensent que c'est là un acte d'extrémistes islamistes ; tout porte à croire qu'ils seraient aussi derrière les autres saccages qui ont eu lieu dans un périmètre réduit aux communes de Sidi Aïch, Chemini, El Flaye, Tibane, Sidi Ayad et Souk Oufella. Le même scénario s'est produit il y a à peine cinq jours dans la commune voisine d'El Flaye, où la population du village d'Izghad s'est réveillée, vendredi, sur la scène choquante d'une soixantaine de tombes profanées. Le phénomène a commencé à la fin de l'année passée, donnant une autre dimension à des actes perpétrés dans de petits cimetières dans la vallée de la Soummam et minimisés jusque-là. Les choses se sont corsées lorsque le cimetière de la ville de Sidi Aïch a reçu la visite, par deux fois, des profanateurs qui ont saccagé 70 tombes en décembre dernier avant de revenir, quelques jours plus tard, pour achever leur forfait en détruisant les «ch'houd» de 172 tombes. 53 autres tombes ont été, entre-temps, partiellement détruites au cimetière de Remila, dans la même commune de Sidi Aïch. Puis ce fut le tour du cimetière de Tighilt, dans la commune de Tibane, de subir le même sort avec 22 tombes saccagées. Des dégâts similaires ont été signalés aussi du côté de Sidi Ayad, mais non confirmés. Plusieurs plaintes ont été déposées contre X et la Gendarmerie nationale a ouvert des enquêtes qui n'ont pas encore permis de mettre hors d'état de nuire les malfaiteurs, qui risquent encore de faire parler d'eux dans un proche avenir. Dans certaines communes, on tente d'organiser la mobilisation. Pour ce faire, une APC a pris contact avec les comités de village tandis qu'une autre, par la voie de son président, a adressé des SMS appelant ces comités de village à plus de «vigilance» et à «surveiller les cimetières», ciblés par «un groupe fanatique». Selon notre source, des individus auraient été appréhendés par les services de sécurité aux alentours du cimetière du village de Mâala, en février dernier, avant d'être libérés pour «insuffisance de preuves». A Akfadou, des sources locales rapportent que des villageois ont aperçu un groupe de quelque huit personnes, en fuite à la faveur de l'obscurité, dans le cimetière d'un village de la commune.