Le plan cancer tant attendu par les malades et les spécialistes chargés de la prise en charge de la maladie cancéreuse sera présenté à l'ONU, selon le ministre de la Santé, Djamel Ould Abbès, à la conférence sur la prévention et la maîtrise des maladies non transmissibles de l'Assemblée générale des Nations unies, qui se tiendra les 19 et 20 septembre à New York. «Un plan national de lutte contre le cancer a été adopté comme un plan modèle pour le continent africain», a déclaré M. Ould Abbès lors de son passage à l'émission de télévision «L'invité de la rédaction» la semaine dernière. Une déclaration qui a surpris les médecins spécialistes en la question et les associations de malades. «De quel plan parle-t-il ?», s'interroge-t-on. «Pour le moment, nous n'avons été destinataires d'aucun plan écrit et publié. Aucune action, à ce jour depuis la présentation du document à l'APN le 7 novembre 2010 par le ministre de la Santé lui-même, n'a été engagée dans le cadre de ce plan. Nous avons effectivement travaillé en 2008 sur un plan cancer et nous avons remis le document au ministre de la Santé de l'époque, Saïd Barkat. Depuis, nous ignorons ce qu'est devenu ce document et qui a rédigé l'actuel plan. Et par qui ce plan a été adopté, puisque aucune diffusion n'a été faite ?», s'interroge Pr Kamel Bouzid, chef de service d'oncologie au CPMC. Et d'ajouter : «Sur quel critère ce plan a-t-il été adopté pour être un modèle pour le continent africain ? Plusieurs pays ont un plan cancer parrainé par une personnalité politique, mis en application sur le terrain et évalué par la suite. A ce moment-là certains peuvent effectivement constituer des modèles pour d'autres pays.» Le Pr Ahmed Bendib, chef de service de sénologie au CPMC, s'interroge également sur le contenu de ce plan. «En quoi consiste-t-il ? Quels sont les échéanciers fixés ?» Des questions qui restent sans réponse puisque les spécialistes concernés par ce plan n'ont pas été associés. «Bien qu'un travail ait été fourni il y a trois ans et un document présenté en novembre 2010, aucune suite n'a été donnée à ce sujet», regrette un autre spécialiste qui précise qu'aucune action n'a été engagée dans le cadre d'un programme avec des délais définis. «Le plan cancer n'est pas l'affaire d'une personne, mais celle de tous», a-t-il déclaré. Pour le Pr Salah Eddine Bendib, chef de service de radiologie au CPMC, un plan cancer est une feuille de route constituée d'un certain nombre de mesures concrètes à mettre en œuvre, en urgence, à court, moyen et long termes pendant une période donnée (4 années en moyenne), afin de lutter efficacement contre le cancer. Ce plan, explique-t-il, est mis au point par des experts reconnus, en tenant compte du contexte épidémiologique du pays, de notre système de santé et des expériences et connaissances médicales actuelles dans le monde. Il sera discuté et validé dans une première étape. Ce plan est symboliquement parrainé par une autorité politique de premier plan, comme le président de la République par exemple. «Une diffusion la plus large possible du document au sein de la communauté médicale doit être assurée et l'accès à ce document est également possible à tous les citoyens», a-t-il ajouté avant de préciser que la dernière étape constitue, bien entendu, l'application pratique de ce plan sur le terrain et son évaluation pour en faire un plan dynamique et renouvelable à l'issue de la période des 4 premières années. Concernant le plan cancer annoncé par la tutelle, le radiologue affirme n'avoir pas été associé et ignore qui l'a mis au point, qui le pilote, qui le parraine. «Je n'ai pas connaissance du document, encore moins de son contenu.» En attendant une réelle volonté politique pour une lutte acharnée contre le cancer qui touche actuellement 44 000 nouveaux cas par an, les malades continuent de vivre le calvaire.