Les puristes se demandent tout simplement ce que ce festival, après cinq éditions, a apporté au malouf. Le festival international du malouf a tiré la semaine dernière sa révérence. Contrairement aux cinq premières soirées, quelque peu boudées par le public constantinois, celle de la clôture, a attiré un nombre impressionnant de mélomanes. Tout le monde avait eu vent, le matin déjà, que le Cheikh Mohamed-Tahar Fergani allait se produire en seconde partie après le groupe irakien El Maqam El Iraki. Lors de ce final, le public a dû patienter presque une heure avant que le rideau du théâtre ne dévoile le groupe du jour. Il aura suffit de quelques minutes de prestation à Maqam E Iraki pour que la salle lui soit complètement conquise. Farida, la diva accompagnant cet ensemble, a tout simplement envoûté les Constantinois, tant par sa voix que par sa présence et sa prestance. Elle ne cessait à travers ses différents chants et poésies improvisés de faire des clins d'œil, en flattant la beauté de l'Algérie, ainsi que celle des hommes et des femmes de nos deux pays. Comme elle le dira, cette soirée construisait un pont entre l'Algérie et l'Irak, via Constantine et Baghdad. Son show inoubliable s'est terminé par l'interprétation de Nedjma Koutbia de Rabah Deriassa. A peine remis de ses émotions après un tel spectacle, le public, allait redécouvrir El Fergani, accompagné de ses fils et petits-fils, qui a profité de l'occasion pour faire découvrir, aux Constantinois et au monde entier, celui qu'il n'hésita pas à qualifier de son «digne successeur». Il s'agit d'un de ses petits-fils, un adolescent, à l'incroyable talent tant sur le plan vocal qu'instrumental. La soirée a été un véritable régal, tant au niveau musical qu'émotionnel. Cependant, passés ces moments d'euphorie, il est temps de dresser un véritable bilan de ce festival, qui, normalement après cinq éditions, ne peut plus se suffire de présenter de bons artistes venus d'ailleurs et se permettre ainsi certains écarts qui, hélas, ont été lot de chaque édition. Interrogés, certains puristes se demandent tout simplement ce que festival, après cinq éditions, a apporté au malouf qui en est pourtant le principal thème. Un festival d'une telle envergure devrait avoir des objectifs, dont le premier serait logiquement de faire connaître le genre au niveau mondial et, pourquoi pas, l'exporter. Or, on a bien vu des groupes et orchestres étrangers, malgré leur immense talent, se produire sans tenir compte de ce détail. Rares sont ceux qui ont bien daigné toucher au malouf, en explorer l'esprit et le lyrisme et s'y essayer au moins. Ce n'était pas le cas. Ghada Shbir, bien qu'elle nous ait sublimés, s'est contentée pour la seconde fois, de jouer des Mouachahat, certes andalouses, mais sans aucun habillage avec le malouf. Idem pour les autres artistes étrangers. Ne pouvait-on pas au moins lui proposer ça ? En cinq éditions, le public n'a jamais eu droit, ne serait-ce, qu'à un métissage entre le malouf et les autres genres. Certains rêvent de voir Ghada Shbir se produire avec l'orchestre régional ou encore une avec une fusion de deux orchestres: marocain et constantinois. Au lieu de cela, le festival fait tout le contraire. Il importe des styles apparentés à la musique andalouse pour garnir ses soirées. Il est vrai que le public a été gratifié, à quelques rares exceptions, par de belles prestations, mais nous ne devons pas être naïfs pour autant et oublier ce que ce festival est censé promouvoir: le malouf.