Le SG du FLN, Abdelaziz Belkhadem, crédite les islamistes de 35 à 45% des voix aux prochaines élections législatives. Prédiction farfelue ou analyse indécente d'un homme politique dont l'ambition autorise des initiatives sinon les plus risquées, du moins parmi les plus douteuses. Mais, en réalité, cette boutade, du premier responsable du parti du pouvoir, cache mal les calculs du régime qui semble accorder ainsi une place importante aux questionnements des chances des islamistes algériens de s'emparer du pouvoir lors des prochaines élections. Les succès en Tunisie et au Maroc de ce courant ont dû faire des émules. Pressentant remporter la majorité des sièges de l'Assemblée populaire nationale (APN), pour les «ikhwan» locaux, les victoires d'Ennahda en Tunisie et du PJD au Maroc les ont enhardis. Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) et le Front de la justice et du développement (FJD, en attente d'agrément) ne jurent que par la victoire. Leurs jumeaux d'Ennaha et d'El Islah espèrent, quant à eux, arracher des strapontins supplémentaires au Parlement. Retour des éléments de l'ex-FIS Premier signe : le MSP bascule dans l'opposition. En témoigne le vote contre tous les projets de loi (sur les associations, sur celui de l'information, et bien évidemment la loi des partis politiques). Son président, Bouguerra Soltani, pense que «les calculs de la majorité au Parlement visent les présidentielles de 2014 ; et essaye de tailler sur mesure des lois pour pouvoir tout contrôler». Autres temps, autres mœurs ? Le virage à 180° qu'a entrepris le MSP n'est pas sans rappeler que depuis 15 ans déjà, la formation du défunt Nahnah ne s'est jamais opposée à une directive ou à un projet proposé par le gouvernement. Soltani indique également que «l'Alliance présidentielle est finie». De par ce divorce (ou répudiation), le dirigeant de l'ex-Hamas déclenche la bataille électorale. Se démarquer n'est pourtant pas chose aisée, dès lors que Belkhadem, lui-même, aime à rappeler que l'Alliance présidentielle reste intacte. Mais sur la scène, d'autres leaders de ce courant se mettent de la partie. Abdallah Djaballah, un come-back à point nommé ? En tout cas, pour lui, c'est l'ultime occasion. Il pense sans complexe remporter les prochaines élections législatives, «si aucune fraude n'entache le scrutin». «Depuis la création du Front, beaucoup d'islamistes et de nationalistes nous ont rejoints. Le FJD répond aux attentes du peuple algérien», affirme-t-il. D'ailleurs, son parti a de fortes chances d'obtenir l'agrément. Pour Djaballah, la moitié du chemin est déjà tracé. A contrario de l'ex-FIS qui, lui particulièrement, se voit interdit de toute activité au titre de la nouvelle loi sur les partis. Mais le MSP ne s'oppose pas à l'activité politique des anciens militants du Front islamique du salut (FIS), dissous en mars 1992 par le tribunal administratif d'Alger. «Il faut donner la liberté et juger avec la loi, et non pas exclure à cause d'une ligne politique. Si on empêche des Algériens de créer un parti, cela est du ressort de la justice et non de l'administration», soutient Soltani. Pareil son de cloche chez Djaballah, Rebaï, Akouchi (El Islah) et Menasra (FCN, dissident du MSP) qui ne considèrent pas le retour des militants du FIS comme un désavantage. «Celui qui jouit de ses droits civiques peut militer dans un parti», souligne le président du FJD. En fait, d'anciens militants de ce parti peuvent militer dans d'autres formations politiques avec, quand même, cette condition que toute éventuelle promotion devra être soumise à l'appréciation de l'administration au titre de l'article 4 de la nouvelle loi.