Kheiredine Boukhrissa, président de la fondation du 8 Mai 1945, est mort ce samedi 17 décembre 2011, à 16h30, à l'hôpital Mustapha Pacha, à Alger, des suites d'une longue maladie. Cet éternel révolté avait trouvé dans l'acharnement pour défendre cette grande cause, perdue depuis presque un demi-siècle déjà, lorsqu'il s'engagea dans le combat pour sa défense, une bataille chaque jour renouvelée à la mesure de son esprit vindicatif. L'architecture, il l'avait choisie comme profession, mais il l'exerça si peu, ici ou là, juste le temps de se «procurer» une nouvelle raison de claquer la porte. Le journalisme, il le pratiqua longtemps comme correspondant local, en oubliant à chaque envolée d'ajuster la muselière imposée, à la taille de son bagout et de ses envolées remplies de colère jamais contenue. Aucune occupation, rabaissée au rang de gagne-pain, ne lui donna jamais les satisfactions nécessaires pour calmer ses ardeurs. Souvent, il eut à traverser d'interminables déserts, au désespoir de ses proches, toujours à cause de son irascible caractère. Un indigné avant la mode, pour tout dire. Jusqu'au jour où, enfin, l'embellie se dessina pour lui, mais surtout pour son épouse et ses jeunes enfants. Dans le sillage de Bachir Boumaza, qui le connaissait, l'appréciait et lui fit appel dès son installation à la tête de la Chambre haute, il alla travailler au Sénat et trouva, dans l'accomplissement de ses nouvelles tâches, l'occasion d'un épanouissement évident. Il remplaça le grand homme à la tête de la fondation dès que la maladie et les rancœurs le contraignirent à prendre ses distances sans s'en couper définitivement. Au sein de la fondation, où il occupait désormais la place la plus importante, Kheiredine investit toute son énergie, renouvelant la lutte pour reconstituer entièrement la mémoire de la grande blessure de l'histoire. Une première attaque de la maladie, qui l'emporta, l'éloigna un moment de l'objet de sa passion au début du millénaire, sans pour autant jamais l'en couper, même si, durant sa longue absence, les loups (même pas jeunes !) trouvèrent l'occasion de briguer sa place. Il reconquiert tous ses pouvoirs dès sa rémission et s'engage de façon tellement plus virulente, tirant sur tous ceux qui montrent la moindre faiblesse devant l'appel à la condamnation des crimes coloniaux en général, et de celui du 8 Mai 1945 en particulier. Il tint bon presque une décennie. Au milieu de cet automne, alors qu'il s'apprêtait à se rendre à Rennes débattre d'une autre barbarie, celle du 17 octobre 1961, il en fut empêché. La maladie était de retour. Elle a eu raison de toutes ses colères. Prière pour l'Absent.