Une artiste palestinienne censurée par une célèbre marque soi-disant mécène. L'historienne de l'art, Nadera Laggoune-Aklouche, nous a fait parvenir le message désespéré de l'artiste palestinienne, Larissa Sansour, que nous traduisons ici : «Chers amis et collègues, je dois vous informer du sévère acte de censure dont je viens juste d'être victime. J'ai récemment été nominée pour le Prix Lacoste-Elisée 2011, décerné par le Musée de l'Elysée de Lausanne et sponsorisé par la marque française de vêtements, Lacoste. La semaine dernière, Lacoste a demandé que ma nomination soit immédiatement révoquée, caractérisant mon travail de ''trop pro-palestinien''. Comme vous l'imaginez probablement, j'ai été profondément troublée par ce développement. Je vous joins un dossier de presse ainsi que trois photos du projet censuré par Lacoste. Je vous prie de le diffuser. Bien à vous, Larissa». Etrange comme le monde de l'art contemporain, prétendument moderne, ouvert et universel, se voit perverti dans ses fondements par de tels actes. On se souvient que l'artiste algérienne, Zineb Sedira, avait été interdite d'exposer dans le sud de la France, par un lobby local de nostalgiques de l'Algérie française qui lui reprochait de montrer une vidéo où sa mère relatait des faits de la guerre d'indépendance. Larissa Sansour est connue du public algérien des arts. En 2008, elle avait participé à l'exposition «Art au Féminin» qui avait eu lieu au MaMa dans le sillage de l'événement Alger, capitale de la culture arabe. Elle avait présenté une vidéo montrant des activistes de la paix s'opposant à des soldats israéliens. Née en 1973 à Jérusalem, cette artiste palestinienne vit et travaille au Danemark. De 1991 à 2000, elle a étudié en Angleterre et aux Etats-Unis l'art académique, l'histoire de l'art, la critique et l'art multimédia. Son art se situant à mi-chemin des deux disciplines, elle participe régulièrement aux festivals d'art et de cinéma dans le monde. Ainsi que le précise un critique, «son engagement pour la cause palestinienne coïncide avec son humanisme et se trouve soutenu par une démarche esthétique qui privilégie les éléments de l'actualité». Cela dit, comment une nomination à un prix, peut-elle être arbitrairement annulée, en dépit de toute logique, règlement et surtout morale ? Les droits d'un sponsor s'étendent-ils jusqu'au droit de bafouer les prérogatives et la compétences d'un jury de spécialistes qui sélectionnent les œuvres ? Et comment reprocher à une Palestinienne d'être «trop pro-palestinienne» ? Viendrait-il à l'idée de reprocher à un crocodile de nager en eaux troubles ? Pendant ce temps, les magasins d'Alger regorgent de ces sauriens sur textiles. Voir le site de l'artiste : www.larissasansour.com