Huit ans après avoir scellé avec le FLN et le RND une Alliance présidentielle muselant toute velléite de l'opposition démocratique, le Mouvement de la société pour la paix (MSP) annonce avec grand fracas son retrait sans pour autant retirer ses ministres du gouvernement. Un divorce qui n'en est pas un et un opportunisme préélectoral pour rallier à ses suffrage les islamistes déçus et les contestataires de tout bord. Après huit années d'entente factice, l'Alliance présidentielle se fissure. Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) vient d'annoncer son divorce avec ses deux partenaires de la coalition, en l'occurrence le FLN et le RND. La décision a été annoncée, hier matin, à l'issue de la réunion du conseil consultatif (madjliss echoura) du parti, dont les travaux ont été ouverts vendredi dernier. C'était prévisible ! Le président du parti, Bouguerra Soltani, avait multiplié, depuis quelques jours, les déclarations dans ce sens. Tout en «rompant le lien» avec ses «amis du FLN et du RND», le parti islamiste ne quitte pas, en revanche, le gouvernement où il préside quatre départements ministériels. Ce qui paraît contradictoire aux yeux des observateurs de la scène politique nationale. «Le MSP soutient toujours le programme du président de la République», déclare les responsables du MSP pour justifier le maintien de leur position au sein de l'Exécutif. Une position qu'ils occupent d'ailleurs depuis 1996, puisque le MSP a pris part à tous les gouvernements dans le cadre de la stratégie d'«entrisme politique» adoptée au temps du défunt Mahfoud Nahnah. L'autre contradiction dans cette position est que le MSP appelle aussi la désignation d'un gouvernement de technocrates pour gérer la prochaine période électorale. Pourquoi alors maintenir ses ministres dans l'Exécutif actuel, composé en majorité de membres de l'Alliance présidentielle, et a appelé en même temps au changement de ce dernier ? Une question sur laquelle le premier responsable du MSP, qui a refusé de faire tout commentaire à l'issue de la réunion du conseil consultatif, devra répondre lors d'une conférence de presse qu'il compte animer dans deux jours. En tout cas, ce retrait de l'Alliance présidentielle est lié en particulier aux prochaines élections législatives. Galvanisé par la victoire des islamistes en Tunisie et au Maroc, le MSP, qui veut prendre le pouvoir en 2012, comme affirmé par Bouguerra Soltani, se voit déjà dans la peau du parti majoritaire au Parlement. Vendredi dernier, à l'ouverture des travaux du conseil consultatif, Bouguerra Soltani avait confirmé cet objectif. «L'année 2012 sera celle de la compétition et non celle de l'Alliance dans le cadre d'élections intègres et transparentes», lance-t-il. Selon lui, «continuer à composer avec l'Alliance à l'horizontale, c'est persister dans la médiocrité politique». «Cela ne sert ni le pays ni le citoyen», estime-t-il. Pour Bouguerra Soltani, le MSP aspire à la compétition aux hauts postes et a besoin essentiellement pour cela de «se libérer du double langage». «La philosophie des réformes est toujours régie par la hantise de la tragédie nationale et la logique de l'état d'urgence. Les lois adoptées dans le cadre des réformes ont été vidées de leur substance, à savoir les libertés, la transparence, la volonté politique et l'ouverture politique et médiatique», dit-il. Quel avenir pour l'Alliance présidentielle ? Continuera-t-elle à exister au-delà de 2012 ? La création de cette troïka en 2004 a été qualifiée, rappelons-le, d'«alliance contre nature» entre trois formations qui ne s'entendent sur rien. Surtout sur le plan idéologique. Il n'y avait pratiquement aucune homogénéité entre ces trois composantes. Et cela a été vérifié lors des précédentes élections. Même entre le RND et le FLN qui se considèrent comme des «partis nationalistes», la rivalité a toujours été féroce depuis 1997, date de la création du RND. Tout récemment, le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, s'est violemment attaqué à ses partenaires du RND qu'il accuse de vouloir «mettre son parti au musée de l'histoire».