Nous nous étions réjouis de la décision d'introduire la lecture d'œuvres littéraires complètes dans l'enseignement général. Cette réhabilitation peut en effet contribuer, de manière efficace, à nourrir l'esprit des élèves, à leur apprendre la logique d'un texte et, surtout, à leur permettre de maîtriser la langue, grand problème qui affecte non seulement le système éducatif, mais s'est répandu également dans la société et touche désormais l'économie, la justice, les médias, la politique et toutes les formes de communication interpersonnelles ou collectives. Les générations nouvelles ne maîtrisent aucune langue, ne savent pas construire une phrase, développer un argument, faire une description ou une démonstration, argumenter, exposer clairement leurs idées, etc. Cela se répercute sur les métiers où l'on ne sait plus rédiger correctement une correspondance, un communiqué, un procès-verbal de réunion, un rapport d'activité, un constat de sinistre ou un bilan médical. Les enseignes de magasins et d'administrations, les plaques d'indication et les affiches se couvrent de fautes et d'erreurs. D'où le bon mot de cet universitaire affirmant que nous n'avions ni monolingues, ni bilingues mais des «zérolingues». Cela prêterait à rire s'il ne relevait pas, gravement, d'un enjeu stratégique de devenir. En effet, les structures linguistiques ne sont pas seulement les vecteurs de l'expression et de l'échange. Elles sont aussi le support des structures mentales et donc de la maturation des idées, des points de vue et des compétences. C'est pourquoi nous nous sommes inquiétés, à plusieurs reprises, que la mesure conjointe du ministère de l'Education nationale et du ministère de la Culture tarde tant à voir le jour. Elle donnait bien l'impression d'avoir été abandonnée après son annonce voilà trois ans. Diverses sources semblent heureusement donner tort à ces inquiétudes. Ainsi, la commission mixte MEN-MC travaillerait d'arrache-pied et aurait avancé dans son programme. Les propositions seraient sur le point d'être finalisées. Il s'agirait notamment de définir la liste des ouvrages à retenir dans ce programme, pour l'essentiel de grandes œuvres littéraires, entre «classiques» algériens et auteurs universels, et ce, dans au moins trois langues : arabe, tamazight et français. De même, on aurait avancé sur le programme de préparation du corps enseignant en charge de la promotion de la lecture. Les idées sur l'achalandage des bibliothèques scolaires se seraient également clarifiées. Enfin, un planning aurait été arrêté et l'on parle désormais d'une mise en œuvre à partir de la prochaine rentrée 2012-2013. S'il semble donc que les choses avancent, pourquoi donc ne communique-t-on pas ? Pourquoi ne sollicite-t-on pas un débat public, une large collecte d'idées et de propositions ? C'est notre devoir d'aller chercher l'information mais, parallèlement, celui des acteurs de la vie publique est de la diffuser.