L'ambassade américaine à Baghdad aurait certainement voulu être une repésentation diplomatique comme toutes les autres. Mais son quotidien fait qu'elle gère tout sauf probablement ce qui a trait à sa vocation première. Et, hier, elle indiquait avoir reçu un corps qui a été remis par les autorités irakiennes, sans dire s'il s'agissait de celui du second otage dont l'exécution a été annoncée mardi par le groupe de Zarqaoui. Une journée peu ordinaire pour un personnel qui vit déjà dans un bunker en pleine guerre où il est, lui aussi, la cible. Sans qu'il y ait le moindre sursis et juste à la fin de l'expiration d'un deuxième ultimatum, un deuxième otage américain enlevé à Baghdad a été décapité, selon ses ravisseurs. Dans un message qui lui est attribué et dont l'authenticité ne peut être vérifiée, le groupe d'Abou Moussab Al Zarqaoui, lié à Al Qaîda, a affirmé mardi avoir décapité un deuxième otage américain et annoncé « une prochaine vidéo » sur la nouvelle décapitation. Lundi avait été annoncée l'exécution du premier otage américain, Eugene Armstrong. Le deuxième Américain répond au nom de Jack Hensley. Il avait été enlevé à Baghdad le 16 septembre avec son compatriote et le Britannique Kenneth Bigley. Le groupe de Zarqaoui, Tawhid wal Jihad, ennemi numéro un des Américains en Irak, avait menacé de tuer ses otages si toutes les Irakiennes détenues dans les prisons d'Abou Ghraib, à l'ouest de Baghdad, et d'Oum Qasr, dans le sud de l'Irak, n'étaient pas libérées. C'est dans ce contexte qu'un responsable du ministère de la Justice à Baghdad a toutefois indiqué hier qu'une prisonnière irakienne pourrait être libérée, tout en soulignant que cette décision n'était pas liée à la revendication du groupe de Zarqaoui. « Le gouvernement irakien considère que Rihab Taha ne constitue plus une menace pour la sécurité nationale et qu'elle peut être remise en liberté conditionnelle contre paiement d'une caution », a déclaré le porte-parole du ministère, Nouri Abdelrahim Ibrahim. Houda Saleh Mehdi Amache et Rihab Taha, surnommées « Dr Anthrax » et « Dr Germ » (microbe), sont selon les accusations portées contre elles liées au programme de développement d'armements biologiques de l'ancien régime de Saddam Hussein et sont détenues dans la prison d'Abou Ghraib. Dans ce climat de violence ininterrompue, quinze Irakiens ont été tués et 52 autres blessés au cours d'une opération de l'armée américaine dans le quartier chiite de Sadr City à Baghdad (deux millions d'habitants), a indiqué un représentant de l'imam chiite Moqtada Sadr. L'armée américaine a annoncé mardi soir avoir lancé une opération d'envergure dans le quartier. Cette opération se poursuivait toujours hier, selon des habitants. Selon la source chiite, l'opération, « la plus dévastatrice à Sadr City depuis la chute de Saddam Hussein » en avril 2003, se concentre sur certains secteurs de la partie occidentale du quartier. A quelques pâtés de maisons, soit dans le quartier de Haïfa, brutalement sorti de l'anonymat pour devenir une nouvelle ligne de front, des affrontements ont éclaté presque au même moment entre l'armée américaine et la résistance. Le 12 septembre, 13 Irakiens ont été tués par des tirs d'hélicoptères américains sur une foule rassemblée pour fêter l'attaque d'un char. Les habitants du quartier l'ont désormais surnommée avec fierté la « petite Falloujah », du nom de la ville rebelle à 50 km à l'ouest de la capitale où les Américains ne s'aventurent plus, préférant y mener des raids aériens. Et comme pour marquer encore davantage cette journée, un attentat suicide à la voiture piégée sur l'avenue Rabiye, une rue commerçante de l'ouest de Baghdad, tuait six personnes et en blessait 54. Un quotidien bien macabre et qui tend malheureusement pour les Irakiens à s'inscrire dans la durée, surtout qu'il est avéré que la situation échappe à tout le monde.