Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) opte pour le boycott des élections législatives du 10 mai prochain. La décision a été votée hier par le conseil national du parti, réuni à Alger, avec seulement deux voix contre. Le RCD est le premier parti à prendre une telle option. Les arguments ne manquent pas. Son président, Saïd Sadi, les a sériés dans un long discours prononcé devant les membres de l'instance consultative. Le fichier électoral est une gigantesque usine à gaz», a indiqué Saïd Sadi, pour qui «les 4 millions de nouveaux électeurs annoncés sont une fumisterie». Du point démographique et administratif, selon lui, «aucune statistique ne peut justifier une telle augmentation en moins de 3 ans pour une population de 35 millions d'habitants». «Il suffit de regarder autour de soi pour voir combien de citoyens s'inscrivent ou se réinscrivent sur les listes électorales», a souligné le président du RCD, qui rapporte : «Hier soir, je discutais avec une parlementaire qui suit le fichier de Beni Douala à Tizi Ouzou : sur plus de 11 000 habitants, il y a eu 81 nouveaux inscrits. Les militaires en opération sont portés d'office sur les registres des communes où ils sont affectés et, souvent, ils ne sont pas rayés quand ils sont déplacés vers d'autres régions…» «Nous avons été et nous restons le seul parti à avoir demandé une surveillance électorale massive et qualifiée. Nous avons informé, documents à l'appui, les institutions internationales du traquenard dans lequel elles peuvent être entraînées», a rappelé l'orateur. Selon lui, «au-delà de l'opacité des conditions techniques qui permettent toutes les manipulations pour gonfler le taux de participation et falsifier les procès-verbaux de consolidation, le pouvoir a créé un problème politique d'où il aura beaucoup de peine à s'extirper». Saïd Sadi pose plusieurs questions qui influent directement sur les élections : «Comment interdire à des associations de citoyens de communiquer avec des ONG étrangères au motif que ces contacts représentent un risque majeur pour la sécurité intérieure et prétendre accepter une observation de la part de ces mêmes ONG ? Comment convaincre qu'un citoyen, considéré a priori comme un traître potentiel, va pouvoir s'exprimer librement dans une élection ?» Le président du RCD donne un argument supplémentaire pour l'option du boycott des élections avant l'ouverture des débats au niveau du conseil national du parti : «Je me dois de vous donner une information : les participants au vote du 10 mai ont tous négocié leur quota.» Saïd Sadi explique les différentes participations de son parti aux précédentes élections. «Malgré les risques de fraude, nous avions accepté par le passé de participer à des législatives quand l'environnement géopolitique et la situation nationale n'offraient pas d'autre alternative que l'exploitation de la fonction tribunitienne de l'Assemblée», a-t-il affirmé. Mais, soutient-il toutefois, «la vulgarité avec laquelle a été menée l'action publique ces derniers mois ne laisse pas beaucoup de choix à celles et ceux qui ont un minimum de bon sens. La prochaine Assemblée sera recrutée sur le mode du proxénétisme et aura une mission de prostitution politique». Il explique : «Composée pour l'essentiel de petits délinquants pris la main dans le sac, cette Assemblée aura pour fonction d'occuper le trottoir parlementaire en attendant que, derrière les rideaux, les maquereaux réorganisent leurs réseaux à travers une succession particulièrement laborieuse.» «Ce n'est plus une décision politique que nous aurons à prendre ; c'est une mesure de salubrité publique que nous devons à notre peuple qui a le droit de compter dans ses rangs des femmes et des hommes qui ont sauvé leur dignité et, partant, l'honneur de la nation», a-t-il lancé à l'adresse des membres du conseil national. Le président du RCD est convaincu que «la révolution démocratique adviendra en Algérie, plus tôt que certains l'imaginent». Selon lui, «le DRS devra bien entendre qu'un pays comme l'Algérie ne peut plus être géré en 2012 par des manœuvres héritées de la guerre froide».