L'étouffement par la direction de l'UGTA des voix de la coordination des syndicats appelant à une réforme de la centrale syndicale n'a pas empêché la contestation grandissante au sein de l'organisation. Ainsi, la colère s'est installée à la zone industrielle de Rouiba, où les cadres syndicaux ont pris part hier à une assemblée générale pour « mettre le secrétariat national de l'UGTA devant ses responsabilités ». Les interventions des syndicalistes se rejoignent pour exiger une nouvelle forme de gestion de l'UGTA. Revendication pour laquelle le secrétaire général du syndicat des Douanes, Ahmed Badaoui, a été non seulement suspendu de sa fonction, mais également de son poste de secrétaire général et de toute activité syndicale. Une sanction qui a lourdement affecté la mobilisation des travailleurs autour de la contestation socioprofessionnelle, sans pour autant les faire reculer de leurs positions de principe. Leur regroupement hier à la salle de conférences de la SNVI et la déclaration qu'ils ont adoptée pour interpeller les responsables de l'UGTA sur la situation catastrophique dans laquelle se débat l'organisation montrent que le désarroi a atteint un seuil intolérable. Le choix de la zone industrielle de Rouiba pour poursuivre la contestation sociale n'est pas fortuit et rappelle étrangement les circonstances qui ont précédé les événements du 5 octobre 1988, notamment la grève des travailleurs de la zone vers la fin septembre. L'enjeu Des circonstances que certains syndicalistes ayant vécu l'événement ont d'ailleurs tenu à rappeler en qualifiant les lieux de poudrière. Ainsi, la colère gronde dans les milieux des travailleurs et rien n'indique que cette fois Abdelmadjid Sidi Saïd pourra accomplir avec succès son rôle de « pompier » tant les syndicalistes semblent intransigeants. La peur qui les paralysait à la suite de la suspension d'Ahmed Badaoui a été vaincue par la solidarité et surtout la nécessité de faire sortir leur organisation de l'impasse dans laquelle elle se trouve. L'enjeu est capital : « Il s'agit d'extirper l'organisation à ceux qui ne la représentent pas, préserver ainsi son avenir face à l'économie de libéralisme sauvage et à la montée grandissante des syndicats autonomes plus dynamiques et plus crédibles vis-à-vis de l'opinion publique. » Une idée qui a fait son chemin et qui risque, dans les jours à venir, de créer une véritable surprise. Elle risque même de brouiller toutes les cartes du secrétariat national, dont le mandat a expiré en octobre 2005 et ce à la veille du 11e congrès de l'UGTA. Ce congrès, faut-il le rappeler, devait se tenir à l'occasion de son 50e anniversaire, prévu le 24 février prochain. Sans explication aucune, il a été remis aux calendes grecques, comme cela est de coutume au sein de l'UGTA. Peut-on croire que la zone industrielle de Rouiba aura le mérite de provoquer le changement au sein de l'UGTA tant réclamé par sa base ? Difficile de donner une réponse. Néanmoins, la volonté féroce des travailleurs d'occuper la rue pour arracher leurs droits et faire entendre leur voix montre que nous sommes au début de la fin.