La proclamation d'indépendance du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) dans le Nord-Mali, annoncée hier par le porte-parole du Mouvement en France, a ajouté à la confusion générale qui prévaut au Mali depuis le coup d'Etat du 22 mars dernier, qui avait renversé le président malien Amadou Toumani Touré (ATT). Les appels unanimes de la communauté internationale pour le rétablissement de l'ordre constitutionnel au Mali, qui n'ont rencontré aucun écho auprès des forces belligérantes, rendent de plus en plus hypothétique la perspective d'une solution politique à la crise malienne. L'entrée en scène de nouveaux acteurs à l'ombre du coup d'Etat militaire contre le président ATT, le MNLA et, depuis quelques semaines, des islamistes du groupe d'Ançar Eddine, qui affichent désormais publiquement leur volonté de créer une République islamique dans le Nord-Mali avec comme capitale la mythique et cultuelle ville de Tombouctou dont ils ont pris le contrôle aux dépens des partisans du MNLA, complique davantage encore la recherche d'une solution politique négociée à la crise malienne. Les nouveaux développements, somme toute prévisibles, intervenus dans le pays ces derniers jours, portent les germes d'une guerre civile dont le pire est sans nul doute à venir. Certes, les coups d'Etat militaires sont aujourd'hui passés de mode et leur durée de survie extrêmement limitée avec la démocratisation des relations internationales, comme on le voit encore avec la junte malienne forcée à la capitulation qui en appelle à l'intervention étrangère pour sauver les populations civiles et les droits de l'homme dans le Nord-Mali. Mais en revanche, les velléités d'indépendance ou de sécession et les «révolutions vertes» portées par des mouvements indépendandistes et djihadistes ne sont pas toujours facilement solubles dans des solutions de compromis politiques. Il est moins facile, aujourd'hui, de déloger un putschiste que de calmer les ardeurs d'un mouvement indépendantiste ou idéologique d'une secte religieuse. Avec trois belligérants qui sont loin de partager la même vision du Mali d'aujourd'hui et de demain, même s'ils avaient mené un combat commun contre le régime déchu d'ATT, l'écheveau du conflit malien s'en trouve de plus en plus entremêlé, faisant du Mali un nouveau Soudan. Un pays menacé d'éclatement non seulement entre le Nord et le Sud, mais éligible à une espèce de sanctuarisation qui se dessine dans le nord du pays avec les proclamations d'Etat indépendant laïc revendiqué d'un côté par le MNLA et islamique de l'autre, caressé par le groupe d'Ançar Eddine. Pour l'heure, les Etats de la région, dont l'Algérie – qui a clairement exprimé, par la voix du Premier ministre Ouyahia, dans un entretien au journal Le Monde, le rejet par notre pays de la partition du Mali – les organisations régionale, continentale et onusienne continuent encore de croire au retour à l'ordre constitutionnel et au respect de l'intégrité territoriale du Mali par la voie du dialogue. L'expérience a toutefois montré que quand les armes commencent à parler et à tonner, a fortiori dans une région où leur circulation échappe à tout contrôle, il est toujours difficile et long de les faire taire par de simples incantations politiques et des appels à la sagesse qui n'ont que peu de chances d'être entendus.