La villa du centenaire est située à Bab Edjedid, à la rue Azzouzi Mohamed. Une ruelle perpendiculaire au boulevard de la Victoire. Ce monument est l'œuvre du pensionnaire de la villa Abdelatif et ancien professeur de la première Ecole nationale des beaux-arts d'Alger, en l'occurrence Léon Claro. « Cet édifice colonial a été inauguré en 1930 par l'empereur français Napoléon Bonaparte, à l'occasion de son premier voyage en Algérie », a-t-on appris auprès de M. Benmedour, chargé des études historiques et de communication à l'Agence nationale de l'archéologie. « La villa du centenaire repose sur les décombres d'un îlot de sept somptueuses douerate (maisonnettes), qui datent de la deuxième médina de la civilisation ottomane. La villa est un condensé de matériaux d'emprunt de fragments des maisons détruites par le génie militaire français, lors de la malheureuse percée de la ville », tient à préciser notre interlocuteur. Les luxueux éléments d'apparat, pareils au darbouz, (accoudoir), les pilastres en spirale et les cadres des portiques évoquent la splendeur des vestiges historiques sacrifiés ainsi par l'occupant sur l'autel de l'ignorance. C'était la démonstration de la prééminence de la doctrine très cavalière de l'envahisseur, doublée du sombre dessein intentionnel de dénigrer la qualité de vie qui prévalait au cours du XVIIIe siècle de l'ère ottomane. Ce monument est l'un des premiers exemples, de la présence coloniale, afin de célébrer le succès et la consécration de l'empire colonialiste français. Cet ouvrage séculaire au goût néomauresque reste une attirance pour les touristes nostalgiques en mal d'exotisme, même s'il exhale l'influence de l'art architectural turc. A l'inverse de l'esquisse traditionnelle d'une douéra de l'antique Casbah où l'on accède directement par la s'qifa (patio), la villa du centenaire évoque le logis sobre dans le genre fahs, avec un jardin ceint d'un mur de façade. Le corridor donne immédiatement dans l'ordonnancement des formes d'un foyer et traduit le résultat de l'ébauche type d'une douéra de La Casbah, bien qu'elle ne soit pas asymétrique. C'est l'expression néomauresque que l'on doit au gouverneur général Jonhart. « Le flot déferlant en l'an 1912 était au goût néomauresque. La tendance illustre jusqu'au jour d'aujourd'hui la conception architecturale de certaines villas et des édifices publics de la capitale, tels le siège des Galeries algériennes de la rue Larbi Ben M'hidi, les anciens locaux de la Dépêche d'Alger, la recette principale de la Grande-Poste situés au boulevard Mohamed Khemisti ainsi que le siège de la wilaya d'Alger à l'avenue Asselah Hocine. La construction de la médersa de la rue Bencheneb en 1950 a mis un terme à la succession des édifices néomauresques, conduite par Jonhart », a conclu M. Benmedour. La villa du centenaire est classée dans le patrimoine Casbah en 1992. Une équipe d'ouvriers travaille en ce moment d'arrache-pied pour restaurer les dégâts causés par le séisme du 21 mai 2003. Le bâtiment est entouré d'échafaudages. « Les dégâts se limitent à quelques fissures sans grande gravité. Un bureau d'études veille à la conformité des travaux », nous confie une archéologue qui nous a reçus lors de notre visite. La villa du centenaire est bel et bien un butin de guerre. Cet antre de la mémoire abrite à juste titre le siège de la direction de la culture de la wilaya d'Alger et est ouvert gracieusement au public.