Belkhadem-Ouyahia-Bouguerra Soltani par-ci, Ouyahia-Belkhadem-Bouguerra Soltani par-là. A longueur de journée, de semaine et de mois, on n'entend parler que de ces trois-là. Le moindre de leurs propos est décortiqué par une presse en quête désespérée de nouveauté, n'ayant rien d'autre à se mettre sous la dent depuis que s'est installé le grand désert politique. Finis les temps bénis pour les journalistes lorsque l'actualité était façonnée par les Aït Ahmed, Saïd Sadi, Mouloud Hamrouche, Sid Ahmed Ghozali, Abassi Madani, Hachemi Cherif et tant d'autres encore. Finis aussi les moments des généraux, à leur tête Khaled Nezzar et Mohamed Lamari qui ont donné du sel à la politique. Et que découvrent aujourd'hui les médias dans cette drôle « d'alliance présidentielle » ? Un chef-d'œuvre d'hypocrisie où ce qui est de mise, c'est le sourire commercial pour camoufler une féroce haine mutuelle. Car il est bien périlleux de se rentrer dedans, en public, au moment où le président de la République est en retrait pour convalescence et puis, mettre en colère Bouteflika, c'est courir le risque de se retrouver carrément dehors. Ce n'est pourtant pas l'envie qui manque à Belkhadem de dire à Ouyahia de déguerpir du poste de chef de gouvernement qu'il ne mérite pas n'étant plus à la tête du premier parti d'Algérie et Bouguerra Soltani, le relayant, de taxer Ouyahia de reliquat de « l'éradication », « indigne » donc de la mise en œuvre de la « réconciliation nationale ». Et Ouyahia bien sûr, de rétorquer à Belkhadem qu'il n'est qu'un sous-traitant de l'intégrisme, lui jetant à la face son épisode iranien et de mettre en garde Bouguerra Soltani sur son jeu dangereux avec les Frères Musulmans d'Egypte et sa fascination du « Hamas palestinien » qui lui fait pousser des griffes acérées. Ah ! que de bonheur, pour les médias, si le linge sale se lavait publiquement. Mais même en famille, ces trois-là ne se regardent qu'en chiens de faïence, et cela durera le temps de voir évoluer les choses du côté de la présidence de la République où se font et se défont les carrières politiques. Surtout ne rien décider. Et d'ailleurs l'alliance a-t-elle un jour pris position sur quoi que ce soit qui intéresse le citoyen ? Sur la corruption, les scandales bancaires, les inégalités sociales, les salaires, les femmes battues, le sinistre de l'école, les journalistes emprisonnés et quoi d'autres encore ? L'aurait-elle pu, d'ailleurs, avec son hétérogénéité politique et idéologique ? Paradoxalement les premières à souhaiter la voir disparaître au plus vite, ce sont les trois partis qui la composent car elle les bride, leur enlève leur personnalité et les soumet de surcroît à une coexistence insoutenable. Parfois ils se hasardent à le dire publiquement mais sans trop aller loin, évitant les cris et autant que possible les chuchotements. En attendant la salutaire implosion, ils mettent en avant, dans les communiqués qui clôturent leurs rencontres sans consistance et sans lendemains, leur couverture commune : le soutien au programme du chef de l'Etat.