Des psychiatres ont débattu des facteurs qui mènent au suicide et ont déploré l'absence de statistiques liées à ce phénomène social. Une journée d'étude portant sur le thème «Suicide : état des lieux et problématiques» a été organisée hier à la salle des conférences du campus universitaire de Tamda, à l'initiative de la faculté des sciences humaines et sociales, en partenariat avec le Centre de Recherche en Anthropologie Sociale et Culturelle d'Oran (CRASC). Trois communications traitant de ce phénomène social ont été données par des enseignants et chercheurs universitaires. Pr Badra Mouttassen-Mimouni du CRASC s'est penchée sur la thématique du «suicide et tentative de suicide en Algérie». D'emblée, la conférencière déplore l'absence de données fiables sur ce phénomène en Algérie, tels que les chiffres exacts du nombre de cas recensés afin de réaliser des études sérieuses sur ce phénomène dans notre pays. Mais selon les chiffres disponibles, il ressort que le taux de tentatives de suicide est beaucoup plus élevé chez les femmes que chez les hommes, contrairement à l'acte de suicide qui est beaucoup plus élevé chez les hommes que chez les femmes. Les facteurs qui poussent à commettre un tel acte extrême sont divers : problèmes de communication dans les familles, échecs amoureux, violences conjugales, échecs professionnels, sont, entre autres, les causes principales qui conduisent à recourir au suicide. La conférencière regrette l'absence totale dans nos structures hospitalières d'espaces réservés pour l'accompagnement psychologique aux personnes ayant commis une tentative de suicide. Pour sa part, Dr Fatma-Zohra Sebaâ, (psychologue clinicienne et chercheuse associée au CRASC) a abordé le thème «Adolescence et tentatives de suicide». Elle affirme que la tranche la plus touchée par le phénomène du suicide sont les personnes âgées de 15 à 35 ans. Selon une étude sur le suicide dans la wilaya de Tlemcen, réalisée en 2006 et 2007 par le professeur Megueni, 9% des cas recensés sont âgés de 10 à 15ans seulement. Les causes qui rendent cette tranche de la société plus vulnérable sont, selon la conférencière, les grands changements qui surviennent à l'âge de l'adolescence, les modifications du corps (sexualisation), le besoin d'autonomie, le deuil des objets enfantins, et aussi, le fait que l'adolescent doit se séparer de ses parents tout en s'appropriant une partie d'eux. L'environnement familial et social et déterminant aussi. Le docteur Mahmoud Doudarène (psychiatre), a, quand lui, axé sa communication sur le thème « Le suicide revisité dans la wilaya de Tizi Ouzou ». Le conférencier a affirmé, avec des chiffres à l'appui, que le phénomène des suicides dans cette wilaya de Kabylie est présenté comme un cliché, résultat de la stigmatisation de la région, de manipulations idéologiques, politiques et religieuses. On enregistre, en moyenne 50 cas par année, avec une prévalence de 4 sur 100 000 habitants, soit 4 fois moins que la moyenne mondiale, et deux fois moins que la moyenne dans les pays méditerranéens. Regrettant l'absence de données nationales exactes, le conférencier dira que le fait que la wilaya de Tizi Ouzou fait souvent parler d'elle quand il s'agit de suicide est tout simplement dû à la grande présence des médias dans la région.