Le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales a dérogé cette fois-ci à la règle ; habituellement, l'annonce des résultats des élections se faisait la matinée. Hier, le chef du département concerné, Daho Ould Kablia, n'a pointé qu'à 16h à l'hôtel El Aurassi qui abrite le Centre international de presse (CIP) pour présenter les résultats officiels des élections législatives du 10 mai. Il a donné d'abord le nombre d'électeurs inscrits, qui est de 21 664 348, et celui des votants, 9 178 056 ; le nombre de suffrages exprimés est de 7 509 549. Celui des bulletins nuls a atteint le chiffre record de 1 668 507. M. Ould Kabilia a commencé sa conférence de presse en annonçant avec une certaine satisfaction le taux de participation de 42,36% : «Il est mieux que celui des élections de 2007.» Il reconnaît cependant l'abstention : «Elle est là et on s'y attendait», concède-t-il, avant de la minimiser en soutenant que ce n'est pas un phénomène propre à l'Algérie. Selon lui, «les Algériens n'ont pas l'habitude de participer à ce genre de scrutin, contrairement aux élections présidentielles». Mais lorsque le ministre de l'Intérieur a commencé à égrener le nombre de sièges obtenus par chaque parti politique, le parterre des journalistes présents à la conférence de presse ont accueilli avec étonnement la large victoire du Front de libération nationale (FLN) avec 220 sièges, suivi par le Rassemblement national démocratique (RND) 68, l'Alliance verte composée de trois formations islamistes (MSP, El Islah et Ennahda) avec 48 sièges. Le Front des forces socialistes (FFS) arrive derrière avec 21 élus dans la prochaine Assemblée, suivi du Parti des travailleurs (PT) de Louisa Hanoune avec 20 sièges. «C'est un vote-refuge, contrairement aux élections de 1991», a souligné le ministre de l'Intérieur pour expliquer la victoire du FLN. La défaite des autres partis est due, selon lui, au fait qu'ils soient nouveaux sur la scène politique, la plupart étant de création nouvelle. Sur les accusations de fraude, M. Ould Kablia affirme que «ce sont des incidents mineurs qui n'influent pas sur les résultats des élections». «Ceux qui ont fait des déclarations dans ce sens ont le droit de faire des recours.» Le ministre de l'Intérieur n'a pas hésité à prendre à témoin les observateurs internationaux en reprenant leurs appréciations sur le déroulement du scrutin. A propos du vote des militaires, le conférencier soutient qu'«aucune injonction ne leur a été donnée». «Ce sont des Algériens comme les autres», se défend-il. Le ministre de l'Intérieur se distinguera, par ailleurs, par une réponse fantasque à une question sur l'écart entre les taux de participation plus élevés au Sud et faibles au Nord. Son explication : «Les gens du Sud sont plus patriotes que ceux du Nord, qui ont dû préférer profiter du long week-end pour aller à la plage.» Concernant la polémique soulevée autour du contrôle du fichier électoral national par les observateurs de l'Union européenne, M. Ould Kablia dit qu'il n'en est pas question. Selon lui, «aucun pays au monde ne l'autorise». Il était possible de le faire, a-t-il dit, pour les fichiers au niveau des communes et des wilayas. Quid des bulletins nuls ? Simpliste, il a indiqué qu'il ne peut pas savoir ce que pensent intérieurement ceux qui ont opté pour un vote blanc. Concernant la contradiction qui existe entre le discours qui promet le changement et de faire la place aux jeunes, et les résultats des élections qui donnent l'ex-parti unique vainqueur, le ministre de l'Intérieur affirme que «c'est le choix souverain des Algériens» ; il se dit lui-même «prêt à démissionner sur le champ si le pays n'avait pas besoin de lui !».