Mercredi 22 février s'est tenue une session extraordinaire de l'APW d'El Tarf, la troisième depuis le début de l'année. L'ordre du jour était de passer en revue le développement local depuis 2001, date du dernier mouvement de walis qui a touché cette région du pays profond. Il y a eu un bilan, verbal, dressé fait par le chef de l'exécutif qui, curieusement, n'a pas été reproduit sur un document écrit comme d'habitude, mais approuvé malgré tout, à l'unanimité, par toutes les formations politiques. En résumé, la wilaya se porte à merveille et il y a eu de grandes réalisations pour lesquelles se sont félicités les membres de l'APW et de l'exécutif qui n'ont par été avares en éloges mutuels allant jusqu'à fixer la date de l'indépendance de la région à août 2001. Jusque-là ça va, c'est le discours habituel qui manifestement ignore toujours les émeutes cycliques, le fort taux de chômage, ce qui fait fuir les investisseurs et la clochardisation générale qui singularise la wilaya. C'est ensuite que la session a dérapé, emportée par une autosatisfaction jubilatoire. « C'est la presse qui est responsable de l'arriération de la wilaya », se contredit aussitôt le wali parce qu'elle n'a pas montré les réalisations que nous avons faites. S'en est suivie une diatribe contre les organes de la presse nationale qui ont rapporté les événements liés aux enquêtes des services de sécurité en cours dans les services de l'administration locale. Il reconnaîtra avoir été abusé par des journalistes ingrats à qui il a donné des logements... en toute transparence, s'est-il rattrapé de préciser. Pour finir, le wali s'est lancé dans la déclamation d'une tirade empruntée à une qacida de Nizar Kabbani, El Hakem oua El ousfour (le gouvernant et l'oiseau), qui s'est achevée dans un tonnerre d'applaudissement et une longue standing ovation. Ce grand poète arabe du siècle dernier, qui a inspiré Faïrouz, Oum Kaltoum et Abd El Halim Hafez, rebelle jusqu'à sa mort à tous les régimes arabes qu'il rend responsables des défaites face à Israël à cause de leur répression des libertés, notamment celle de la parole, a dû se retourner dans sa tombe oubliée du petit cimetière de Damas.