Le procès en appel de Mohamed Boukhari, ancien conseiller du PDG d'Algérie Télécom, a été reporté au 14 août en raison de son absence à l'audience. Un mandat d'amener a été délivré à son encontre, alors que, selon ses avocats, il est hospitalisé dans l'établissement pénitentiaire. La défense s'insurge et craint un procès inéquitable… Venu hier pour juger coûte que coûte l'affaire, le président de la chambre pénale près la cour d'Alger a renvoyé le procès de Mohamed Boukhari, ancien conseiller du PDG d'Algérie Télécom (2004-2006), au 14 août. Poursuivi pour «corruption, trafic d'influence et blanchiment d'argent», le prévenu devait comparaître avec Mohamed Chani, homme d'affaires algéro-luxembourgeois (poursuivi dans le cadre de l'affaire de l'autoroute Est-Ouest) et deux sociétés chinoises, ZTE et Huawei. Le juge Tayeb Hellali ne semblait pas convaincu par les raisons ayant motivé l'absence de Boukhari. «Je n'ai aucun document qui prouve que le prévenu se trouve à l'hôpital de l'établissement pénitentiaire», dit-il à maître Maachou, avocat de Boukhari. Ce dernier réagit : «C'est au parquet de vous donner cette preuve, parce que le prévenu est sous la responsabilité de l'administration pénitentiaire.» A ce moment, maître Khaled Bourayou, avocat de Chani Mejdoub, réitère sa demande relative à la convocation en tant que témoins du représentant de la banque Natexis du Luxembourg et de Dominique Fermier, un de ses intermédiaires, à l'origine de l'inculpation de Chani Mejdoub dans cette affaire. «Nous insistons sur la présence de ces témoins, parce qu'ils sont à l'origine de l'inculpation du prévenu et de sa condamnation à 18 ans de prison. C'est sur la base de leurs réponses à la commission rogatoire que mon client a été poursuivi. Il est donc important de les entendre», déclare Me Bourayou. «Nous allons examiner la demande lors du procès en présence de Boukhari», répond le juge, suscitant la riposte de l'avocat : «Notre demande n'a rien à voir avec Boukhari. L'absence de convocation de ces deux témoins nous met dans l'impossibilité matérielle de plaider l'affaire, parce que nous nous retrouverons devant un procès inéquitable.» Le magistrat fait mine de ne rien entendre et passe à la défense de la société chinoise ZTE, représentée par maître Fatma-Zohra Chenaif, qui demande la convocation des représentants d'Algérie Télécom en tant que témoins et la présence d'un traducteur pour ses mandants chinois lors du procès. Après avoir écouté et pris note des demandes de la défense, le juge rend une décision des plus intrigantes : il délivre un mandat d'amener à l'encontre de Mohamed Boukhari, alors qu'il est en détention depuis déjà plusieurs mois, et renvoie l'affaire au 14 août tout en déclarant : «Ce sera le dernier renvoi. L'affaire sera jugée quelles que soient les conditions.» Ce qui suscite les appréhensions de la défense de Chani Mejdoub. «L'insistance du juge à vouloir juger l'affaire sans que les conditions d'équité ne soient réunies est très grave», dit-il en menaçant «de ne pas assurer» la défense du prévenu «dans ces conditions». A signaler que le tribunal d'Alger avait condamné, en juin dernier, Mohamed Boukhari et Mejdoub Chani à 18 ans de prison ferme assortie d'une amende de 5 millions de dinars et de la confiscation de leurs biens. Les deux sociétés chinoises quant à elles ont été condamnées en tant que personnes morales à une amende de 3 millions de dinars et à une exclusion des marchés publics pendant une durée de trois ans. Trois de leurs responsables, en fuite, ont écopé d'une peine 10 ans de prison.