- Le recours à la médecine alternative semble prendre des proportions importantes en Algérie. Quelles sont, d'après vous, les raisons de ce rush vers les centres d'herboristes et de guérisseurs ? Il n'y a d'alternative à la médecine moderne et scientifique que par une médecine moderne en progrès. Vous avez remarqué que la médecine à travers les diagnostics et les traitements a explosé, depuis 1945, avec la découverte de moyens de diagnostic de plus en plus performants et de thérapeutiques performantes et de plus en plus efficaces. L'exemple de la tuberculose est édifiant. Avant la découverte de la streptomycine par Waksman en 1945, la tuberculose était une maladie mortelle qui décimait les hommes et les femmes de tout âge. Aujourd'hui, on l'assimile à une mauvaise grippe par l'apport des antibiotiques. Les formidables progrès de la médecine d'allure exponentielle en font une science qui n'est pas exacte et sujette encore à des découvertes. Pour qualifier l'alternative de la science médicale ne peut être assumée que par d'autres découvertes dûment appliquées. De façon générale, les rebouteux et les guérisseurs ont existé de tout temps. Ils exercent leurs activités par rapport à une minorité déçue ou insatisfaite des soins et traitements médicaux classiques. Les Algériens ont tendance à aller consulter ces charlatans sous prétexte de la difficulté de l'accès aux soins dans les services publics ou l'insatisfaction vu l' état actuel des hôpitaux, surtout que certains souffrent de maladies chroniques qui n'ont pas encore de solutions thérapeutiques.
- Plusieurs établissements de soins par les herbes, sous forme de succursales, sont installés à travers le pays et proposent des traitements pour des maladies chroniques et pathologies graves. Est-ce que les malades peuvent être réellement soulagés par cette médecine alternative ?
Les établissements que vous évoquez sont des officines qui fonctionnent dans une légalité relative, dont les statuts méritent d'être éclaircis. Comment des individus étrangers de surcroît exercent la médecine puisqu'ils font des diagnostics par procuration (personnel réceptionniste) et exercent la pharmacie tout en moyennant des sommes astronomiques ? Il est clair que ce genre d'activités est tout à fait nuisible à un pays de grande médecine comme le nôtre. Les procédés et les mixtures illusoires dispensés doivent cesser. La responsabilité des pouvoirs publics intersectoriels (ministère de l'Intérieur, ministère de la Santé…) est totalement engagée pour la santé des Algériens. Le conseil national de l'Ordre dans l'exercice de l'art médical engage les citoyens à faire confiance dans la médecine de leur pays et ne pas tomber sous le charme de ces charlatans et autres vendeurs de poudre de perlimpinpin sous couvert d'un manteau religieux factice qui ne sert que les intérêts de leurs auteurs.
Des conséquences graves sur la santé peuvent donc survenir si ces potions viennent à remplacer les traitements médicaux ? Il est clair que lorsqu'on encourage les malades chroniques à arrêter leurs traitements médicaux et de les remplacer par des mixtures alimentaires obscures, on ne peut s'attendre qu'à des dangers immédiats et à long terme. La question qui se pose est de savoir si ces substances sont efficaces pour guérir, voire stabiliser toute une panoplie de maladies, pourquoi leurs auteurs ne créent pas des laboratoires afin d'exporter dans les pays occidentaux et faire concurrence aux grands groupes pharmaceutiques ? Il s'agit d'une escroquerie aux soins et aux traitements.
- Quels sont, d'après vous, les moyens pour lutter contre ce type de pratiques nuisibles à la santé ?
Ce sont les pouvoirs publics qui doivent définir l'exercice de la phytothérapie et lui donner contenance légale pour palier à cet imbroglio qui se joue de la bonne foi des gens. Comme ils doivent interdire les potions inefficaces, voire dangereuses de ces charlatans dans notre pays. L'Ordre national des médecins se réserve le droit d'ester en justice toute activité médicale illégale.