Infosoir. La pratique de la Rokia et de la hidjama, sont-elles des actes médicaux ? La pratique de la rokia et de la hidjama ne sont pas des actes médicaux. Bien qu'il n'existe pas de définition de l'acte médical, sa définition ne peut être que celle qui définit l'exercice de la médecine puisque l'un est consubstantiel de l'autre. La rokia et la hidjama ne sont ni enseignés dans le cursus des études médicales ni pratiqués dans les services hospitaliers publics. La nomenclature des actes médicaux, qui est un répertoire officiel non exhaustif des actes médicaux pratiqués par les médecins à but diagnostic ou thérapeutique, ne fait nullement cas de ces actes. Les actes de thérapie médicale, à soubassement religieux, ne sont pas stricto senso des actes médicaux quand bien même ils seraient pratiqués par des médecins, si tel était le cas, ils devraient exercer leurs vertus sur toute personne, indifféremment de son soubassement culturel ou religieux, comme le ferait un comprimé d'aspirine sur toute fièvre en toute circonstance et en tout lieu. Il est par ailleurs admis par les non médecins qui pratiquent la rokia que ses effets s'exercent non par l'acte lui-même de la rokia, mais à travers la volonté d'Allah sur une personne réceptive à «l'effet thérapeutique» de cette rokia. La pratique de la Rokia par un médecin au sein et en dehors d'une structure médicale, est-elle réglementaire ? La pratique de la Rokia par un médecin au sein et en dehors d'une structure médicale n'est pas réglementaire. L'exercice de la médecine dans le secteur privé est réglementé. Il est soumis notamment à une autorisation d'ouverture d'un cabinet médical délivrée par une autorité officielle compétente. Cette autorisation est délivrée à l'évidence pour l'ouverture d'un cabinet médical dédié à un exercice exclusif des actes médicaux, de diagnostic ou de soins, dans le cadre des compétences que lui confère son diplôme de docteur en médecine. Déjà que la réglementation ne permet pas à un médecin spécialiste d'exercer, régulièrement, la médecine générale ou d'autres spécialités médicales, comment le permettrait- elle pour l'exercice par un médecin de pratiques non médicales ? Ces pratiques sont en infraction avec les dispositions réglementaires du décret 92/276 du 6 juillet 1992 portant code de déontologie médicale. L'article 2 de ce décret précise qu'il s'agit «de médecin autorisé à exercer la profession dans les conditions prévues par la législation et la réglementation». La pratique d'actes non médicaux de thérapie traditionnelle dans un cabinet médical est une infraction à cette disposition. L'article 16 de ce décret stipule que «le médecin ne doit pas entreprendre ou poursuivre des soins ni formuler des prescriptions dans des domaines qui dépassent ses compétences et ses possibilités». Comment en serait il autrement pour un médecin s'aventurant dans une pratique où son diplôme de médecine ne lui confère aucune compétence ? L'incompétence des médecins qui pratiquent ces actes non médicaux les met en situation de pratique de charlatanisme. L'article 31 du décret stipule que «Toute pratique de charlatanisme, qui est le fait de proposer à un malade comme salutaire un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé, est interdite à tout médecin». La pratique de la Rokia et de la Hidjama par des charlatans représente-t-elle un acte condamnable par la loi ? La pratique de la Rokia et de la Hidjama par des charlatans, ou médecin ou tout citoyen, est un acte condamnable en vertu des articles 288, 289 et 290 du code pénal. Qu'est ce que vous avez à dire, lorsqu'on vous dit que la Rokia et la Hidjama sont pratiqués dans certains salons de coiffures pour dame ? Que la rokia et la hidjama soient pratiquées dans un salon de coiffure pour dames, ou pour hommes ou sur la place du marché par les charlatans, guérisseurs et autres camelots ne modifie en rien la problématique. Elle reste l'expression d'un abus de confiance, de l'exploitation éhontée de la crédulité des personnes et de la cupidité des hommes. Cette situation interpelle les pouvoirs publics, tout particulièrement les ministères de la santé, de l'intérieur, de la justice et la société afin de résorber les principaux facteurs qui participent à sa genèse : analphabétisme, sous médicalisation, absence d'éducation sanitaire, chômage, précarité économique et vide juridique. Président du conseil de l'ordre des médecins de Blida