«Ce n'était pas un avion mais un bus pour Boumati ! Il y avait 27 passagers en trop dans l'avion. Le personnel de bord nous a obligés à mettre les enfants sur nos genoux ! Au moment du décollage, j'ai demandé une ceinture supplémentaire pour mon fils et l'hôtesse m'a répondu qu'il n'y en avait plus de disponible. Une passagère a demandé à un steward si les places de ses enfants mis sur les genoux seraient remboursées. On lui a sèchement rétorqué que non !» Amel n'est pas près d'oublier son retour de vacances avec Air Algérie. En ce début septembre, les anecdotes de passagers excédés se multiplient. A l'aéroport international Houari Boumediène, c'est même la cohue devant les différents espaces Air Algérie. «Depuis hier, je tente de repartir en France, raconte cette mère de famille complètement désemparée. Mon billet a été vendu, alors que mon retour était réservé par le biais d'une agence parisienne depuis avril dernier. Cette compagnie finira par nous user tous.» Les réactions comme celle-ci fusent. Principales victimes : les usagers. Principal accusé : la compagnie Air Algérie, censée être la «vitrine» extérieure de notre pays. Une famille tout entière nous interpelle dans le hall de l'aéroport. «C'est fini ! Plus jamais je ne voyagerai avec Air Algérie. Trop, c'est trop ! renchérit Mokrane, père de 4 enfants, domicilié à Rouen. Entre les retards fréquents, devenus une habitude au fil des années et les problèmes de billets, voilà qu'on nous demande de voyager séparément, alors que nous avons tous réservé pour le même vol, le même jour. Ce n'est pas digne d'un pays comme l'Algérie, ce n'est pas digne de nos valeureux chouhada, 50 ans après l'indépendance». Pour Louiza, son épouse, la seule solution est de privatiser la compagnie. «Pourquoi ne la vendent-ils pas, puisqu'ils sont incapables de gérer le ciel ? s'interroge-t-elle. En plus, avec le prix du billet aller-retour qui avoisine les 1000 euros, tout nous dissuade de venir passer des vacances chez nous. Honte à Air Algérie !» Des usagers mécontents pressent le pas du côté de l'enregistrement des bagages où règne une immense anarchie, malgré la présence du personnel de l'aéroport. Les files d'attente sont peu respectées. TRIPATOUILLAGE «Ça ne sert à rien de faire la queue correctement, constate Omar, 25 ans. Il y en a toujours qui trouvent le moyen de passer avant les autres. Et ça ne se passe qu'avec Air Algérie ! Une fois, un couple venu de nulle part est carrément passé devant moi pour enregistrer ses bagages, et j'ai constaté que la personne chargée de l'enregistrement est une connaissance. No comment.» Un enregistrement de bagages, selon certains, complètement bâclé, puisque nombreux sont les cas où des cabas, des valises... manquent à l'arrivée. «Quand je suis venue, à la mi-juillet, raconte Anissa, 22 ans, étudiante à Paris, j'avais deux valises et un cabas. A mon arrivée à Alger, je n'ai retrouvé plus qu'une valise. Personne ne m'a donné d'explication. J'ai eu beau me plaindre et j'ai eu droit en guise de réponse à un laconique ‘‘Ce n'est pas mon problème''. J'estime que les passagers qui, comme moi, ont perdu des bagages devraient porter plainte contre Air Algérie. Plus nous serons nombreux, mieux la justice avancera.» Une autre mésaventure est arrivée à Rafik et Manal, un jeune couple. «Tout avait bien commencé, raconte Rafik. L'enregistrement s'est bien déroulé, et en plus l'avion est parti à l'heure.» «Mais, poursuit Manal, la surprise a eu lieu à l'arrivée à Alger, parmi nos bagages, une valise, complètement identique à la mienne, contenant d'autres vêtements et objets que les miens. Un tripatouillage a dû se faire entre les deux valises identiques et au final, deux voyageuses sur le carreau à cause d'une mauvaise gestion de l'enregistrement des bagages, voire de l'embarquement de ceux-ci dans l'avion. L'incompétence règne dans cette compagnie, et elle continuera de sévir tant qu'elle sera gérée par des incapables et des profiteurs.» MA TAHACHMOUCH ! L'anarchie est présente non, seulement du côté de l'enregistrement des bagages mais également du côté du comptoir Air Algérie réservé aux listes d'attente. Attroupement généralisé. Homme, femmes, jeunes, moins jeunes. L'atmosphère est tendue, beaucoup essaient de se faire une place pour pouvoir accéder rapidement au guichet. Presque tous sont des mécontents qui n'hésitent pas à s'en prendre verbalement au personnel de la compagnie, qu'il soit masculin ou féminin. «Mademoiselle, comment ça, ce billet est promotionnel ? On ne m'a rien dit lorsque je l'avais réservé en bonne et due forme.» Ou bien : «Une pénalité de 6000 DA ? Tout ça parce que ma place a été vendue. Wallah aâyib aâlikoum, ma tahachmouch !» Une femme âgée nous interpelle : «A cause d'une erreur de date, je suis obligée d'acheter un autre billet. Mais ce n'est pas de ma faute ! Ils n'ont qu'à mieux vérifier leur travail, je devais repartir hier (le 04/09/2012) en France, et je n'ai pas pu, parce que le billet était daté du 4 septembre 2011… Et maintenant, on me réclame non pas les 6000 DA de pénalité mais carrément le prix d'un nouveau billet. De quoi vous rendre malade !» Rabah, qui devait se rendre à Constantine, a vu son billet rectifié avec lieu d'arrivée autre que la ville des Ponts suspendus. «Je devais me rendre de toute urgence à Constantine, pour un enterrement, explique-t-il. Mon billet était fin prêt, je devais partir ce matin. Finalement, on m'annonce que l'avion est déjà complet et on me propose de partir pour Annaba !» CALVAIRE Un cas quasi identique s'est annoncé pour deux sœurs, originaires d'Oran, obligées de voyager séparément. Houaria, l'aînée est très remontée : «Nous avions réservé initialement pour rentrer chez nous à Oran. Et voilà qu'on nous annonce que l'avion est complet mais qu'il reste une place. On nous propose que l'une de nous deux parte sur Oran et que l'autre atterrisse à Tlemcen. Et en plus, on nous dit que c'est à prendre ou à laisser. Hagrouna!» Pour Hamid, un habitué pourtant des vols intérieurs, il est clair que la situation devient de plus en plus invivable. «Je voyage chaque semaine, mais régulièrement, j'ai droit à des désagréments. Si ça continue, je crois que je vais abandonner définitivement ce type de transport pour voyager par route ou par train, même si c'est plus long.» n