Le DG de la chaîne TV4 est poursuivi pour «harcèlement sexuel, attouchements, propositions indécentes, vexations et brimades». Le procès opposant trois femmes, (deux journalistes et une scripte), à leur employeur, le directeur général de la chaîne de télévision amazighe (TV4), L. S. a été reporté, hier, par le tribunal de Sidi M'hamed au 30 septembre. Poursuivi pour harcèlement sexuel, L. S., âgé de 76 ans, s'est présenté hier à l'audience. Les plaignantes et leurs avocats ont répondu également présent à l'appel, mais ils n'ont pas été entendus sur le fond de l'affaire puisque le juge a décidé de reporter le procès pour la deuxième fois à la fin du mois. Ce procès devait se tenir la première fois, le 24 juin dernier, toutefois le président de la section correctionnelle près le tribunal de Sidi M'hamed, à Alger, avait décidé de reporter l'examen de cette affaire à hier. Maître Youcef Dilem, avocat des plaignantes, estime qu'il s'agit là d'une procédure tout à fait courante. Rappelant la genèse de cette affaire, en août 2011, les trois employées avaient décidé de dénoncer les agissements de leur patron. Elles déposent plainte contre lui pour harcèlement sexuel, attouchements, propositions indécentes, vexations et brimades. La machine judiciaire est actionnée et le juge d'instruction émet alors une ordonnance pour le renvoi de l'affaire devant le tribunal. L. S., qui occupe toujours le poste de DG de la TV4, est inculpé sur la base de l'article 341 bis du code pénal. Le prévenu risque un emprisonnement de deux mois à un an et une amende allant de 50 000 à 100 000 DA. Hier, au tribunal de Sidi M'hamed, nombreuses étaient les personnes qui ont fait le déplacement pour soutenir les trois employées, à savoir des représentants des Ligues des droits de l'homme, de simples citoyens et des syndicalistes. Le harcèlement sexuel dans le milieu du travail existe à travers le monde. Seulement, certains Etats garantissent une protection contre ce délit dans leur Constitution, d'autres non. Trois éléments sont constitutifs du harcèlement sexuel : l'abus d'autorité, un acte fautif et un résultat. Soumia Salhi, membre de la commission des femmes travailleuses de la centrale syndicale, rappelle le combat mené pour la mise en place d'une loi cadre sanctionnant les violences à l'encontre des femmes. En Algérie, explique-t-elle, c'est une campagne, menée en 2003 par la commission qu'elle dirige, qui a brisé le tabou grâce aux nombreux témoignages et plaintes de salariées. La société algérienne découvre alors l'ampleur et la gravité du phénomène. Une disposition pénale consacre en 2004 l'infraction du harcèlement. Cette mesure unique figure dans le chapitre 2 «crimes et délits contre la famille et les bonnes mœurs», alors que, selon Mme Salhi, sa place naturelle est dans le chapitre 1 «crimes et délits contre les personnes». C'est, en effet, l'intégrité physique et psychologique des victimes qui est d'abord en cause. Les défenseurs des femmes victimes de violence au travail se réjouissent de constater que l'avant-projet du code du travail a introduit des dispositions nouvelles qui «assimilent à un licenciement abusif le fait que le salarié(e) soit contraint de quitter son travail lorsqu'il établit que son employeur a commis à son encontre toutes formes de pression rendant impossible la poursuite de la relation de travail, notamment le harcèlement sexuel». «Le harcèlement sexuel sera donc intégré désormais dans la législation du travail, ce qui permettra d'inverser la charge de la preuve et le salarié sera protégé du licenciement, même s'il dépose une plainte contre l'employeur pour harcèlement ou qu'il participe à des actions judiciaires à son encontre dans le cadre des dispositions légales en vigueur.»