Avec un cheptel national en croissance continue s'élevant à plus 330 000 têtes, l'élevage de camelidés reste le parent pauvre de la filière dans notre pays. La valorisation du dromadaire algérien, de sa viande, de son lait et produits dérivés est devenue une nécessité pour la sécurité alimentaire d'une large frange de la population des zones sahariennes, où la viande du dromadaire constitue plus du tiers des abattages de viande rouge selon les statistiques officielles. La mise en place d'une stratégie de connaissance et de valorisation du dromadaire en Algérie est longtemps restée un vœu pieu des chercheurs algériens dont la recommandation d'un intérêt particulier à cette espèce rustique accompagne toutes les rencontres scientifiques spécialisées. L'absence d'une telle stratégie et de structures dédiées à cet élevage a poussé la recherche scientifique focalisée sur le dromadaire à trouver son épanouissement sous d'autres cieux, où les résultats obtenus au fil des années ont été présentés dans des pays comme la Mauritanie, le Sultanat d'Oman et l'Arabie Saoudite, où l'élevage de camelidés est très prisé et développé, mais aussi dans des pays européens comme la France où la recherche s'y intéresse de près et y consacre des moyens colossaux. C'est pour cette raison que la présentation, mardi dernier, d'une note méthodologique relative à l'étude portant amélioration des conditions d'élevage dans les parcours sahariens au niveau du commissariat au développement de l'agriculture des régions sahariennes de Ouargla a suscité beaucoup d'intérêt au sein d'une assistance acquise à la cause du dromadaire, constituée des représentants des différents centres de recherche en agriculture, des directions des services agricoles, des chambres professionnelles d'agriculture et des éleveurs. L'étude en question englobe un territoire de 2 millions de km2 avec 7 phases étendues sur deux années avec pour objectif d'élaborer une approche concrète visant l'identification et la délimitation des zones de parcours camelin, l'étude des espèces végétales et animales, du potentiel fourrager, une étude socio-économique, un diagnostic des contraintes entravant l'évolution de l'espèce et une stratégie de développement de l'élevage de camelidés en particulier, ainsi que caprin, ovin et bovin dans le Sahara algérien. C'est ainsi qu'un système d'information géographique (SIG) des zones de parcours sera élaboré pour la première fois avec une cartographie détaillée, des photos aériennes et des images satellitaires. 8 enquêtes sont également prévues afin de mieux connaître le dromadaire et déterminer une terminologie commune, définir et spécifier les caractéristiques de sa viande, son lait et autres produits dérivés, l'inventaire des espèces animales qui l'entourent ainsi que les systèmes d'élevage, localisation des canaux éoliens et surtout l'adaptation du cadre institutionnel des zones sahariennes aux spécificités locales et la mise en place de dispositifs incitatifs pour l'élevage du dromadaire. Ce projet d'étude exhaustive a fait l'objet d'une présentation où l'assistance a pu apporter son enrichissement et critiques, notamment les éleveurs qui déplorent le retard dans la prise en charge effective de l'espèce emblématique du Sahara dans les programmes ministériels. Ainsi, les représentants des éleveurs ont souligné la recrudescence des cas d'empoisonnements dus aux bourbiers pétroliers et l'absence, suite à l'exploration du pétrole, dans des aires naturelles du dromadaire. Des centaines de décès sont en effet recensés à travers les zones pétrolières, et ce qui pénalise les éleveurs est l'absence d'une réglementation obligeant les firmes pétrolières à les indemniser en cas de décès de leur cheptel. D'où la proposition de la mise en place d'une législation spécifique forçant les sociétés à la remise en l'état des lieux et l'indemnisation des professionnels. La perspective de créer des fermes afin de moderniser l'élevage du dromadaire a également été retenue. Les professionnels ont également recommandé la prise en compte des autres espèces rustiques, notamment la chèvre et la vache sahariennes et l'amélioration de la couverture sanitaire, notamment avec l'entrée sur le territoire national de troupeaux porteurs de maladies contagieuses venus du Mali et du Niger. Le conservateur des forêts de la wilaya de Ouargla a pour sa part recommandé au ministère la mise en place d'un cadre législatif pour la préservation des zones sahariennes qui subissent de profonds bouleversements avec l'exploration pétrolière et le gaspillage des eaux souterraines afin d'encadrer les interventions et permettre de poursuivre les pollueurs en justice. Les recommandations se sont également focalisées sur la prise en charge des problèmes spécifiques des zones frontalières ou se concentre l'élevage de camelidés, mais aussi la réhabilitation des parcours traditionnels constitués de zones de transhumance et de zones d'attente étalées sur 10 millions d'hectares situés entre la steppe et le Sahara et dont la majeure partie a disparu à cause du tarissement du couvert végétal.