On compte 15 000 patients soumis à la dialyse en Algérie, avec environ 1000 nouveaux cas par an, sinon plus, (il n'existe pas de statistiques fiables en la matière). Cependant, une étude élaborée en zone urbaine, par une équipe du CHU de Batna, permet d'avancer que 30 nouveaux cas/an de dialysés sur un million d'habitants atteindront le stade terminal de la maladie. Les travaux du deuxième séminaire d'uro-néphrologie de l'Est, sous le thème révélateur «Le rein au carrefour des spécialités», organisé par l'Union médicale algérienne (UMA) avec la collaboration du service de néphrologie du CHU de Hussein Dey (Alger), de l'EHS Daksi (Constantine), et celui du CHU de Batna, qui s'est déroulé ce vendredi à l'hôtel Novotel de Constantine, met en avant la notion de prévention, grâce à l'accès aux soins pour tous et la prise en charge de tous les problèmes sous-jacents aux pathologies rénales à travers tout un réseau de disciplines «qui devront travailler indissociablement, comme les maillons d'une même chaîne», selon le Pr Abderrezak Dahdouh, président du conseil médical de l'EHS Daksi. Les différentes communications (de véritables cours) livrées par d'éminents spécialistes d'Alger, Annaba, Batna, Constantine, Oran à un parterre de 400 jeunes praticiens, exerçant loin des grandes villes pour la plupart (qui disent tâtonner face au désarroi de leurs patients), se sont articulées sur plusieurs formes de maladies rénales et sur le dépistage précoce et/ou le suivi de certaines pathologies, comme le diabète et l'hypertension artérielle, responsables pour une large part de ces maladies. La transplantation rénale freinée par le lobbying Un néphrologue dénoncera, en aparté, «les mauvaises volontés et les calculs politiciens de certains responsables qui marginalisent les compétences et ralentissent les greffes rénales par des considérations stériles». A titre d'exemple, l'EHS de Daksi (Constantine), qui était arrivé à 15 greffes rénales en 2007, en est aujourd'hui à 4 par an. Selon ce médecin, cela est dû au code des marchés qui est «très restrictif». Pour un autre praticien, «c'est une affaire de mauvaise gestion, d'incompétence, de personnes qui ont un pouvoir de décision dont elles abusent au détriment des malades.» Un spécialiste abonde dans le même sens : «Les infrastructures ne sont pas rationalisées et les ressources humaines mal gérées ; des services sont en travaux depuis 20 ans (à Alger) et tout le monde se tait. La greffe à partir de cadavres pourrait régler pas mal de problèmes, mais qui se soucie de mettre au point des équipes pluridisciplinaires prêtes à intervenir H24 ?» Ces vérités avouées sous le manteau en disent long sur l'état du secteur de la santé dans notre pays. Ce pays sur lequel semble s'abattre une éternelle malédiction. On espère pourtant que les remarquables travaux et autres suggestions de ces équipes de spécialistes seront entendus par les décideurs. Ces hommes de science ont eu le mérite de remettre en question le protocole actuel de traitement systématique par l'hémodialyse, qui non seulement revient très cher à l'Etat (2 millions de dinars par an et par patient), mais peut être évité au profit du développement de la dialyse péritonéale (600 000 DA/an) et de la transplantation rénale (450 000 DA/an). Le Dr Saïd Khaled, président de l'UMA, insiste également sur la prévention et sur la relance de la greffe rénale : «Il faut absolument arriver à faire plus de transplantations et surtout plus de prévention ; sans cela, les centres de dialyse demeureront toujours débordés et les patients sans soins de qualité.» Il faut savoir qu'il existe seulement 300 centres d'hémodialyse à l'échelle nationale, 10 services de transplantation rénale qui réalisent moins de 100 greffes/an pour tout le pays, et moins de 20 centres de dialyses péritonéale.