L'ancien chef de gouvernement, Mouloud Hamrouche, a une vision plutôt pessimiste quant aux chances de l'Algérie de surmonter sa crise des années 1990. « L'Algérie d'aujourd'hui n'a pas les moyens de régler ses problèmes (politiques) », a-t-il déclaré, hier à Alger, lors d'une conférence-débat sur la compétition politique en Algérie, animée dans le cadre de la session printanière du MSP sur la formation politique. M. Hamrouche estime que le pays a raté sa chance : « L'Algérie avait, à l'époque (les années 1990, ndlr), les moyens et les capacités de traiter sa crise. » Elle ne l'a pas fait ! « A l'heure actuelle, explique-t-il, la situation est devenue plus complexe, la crise est plus profonde et plus accentuée. » Sans l'évoquer explicitement, M. Hamrouche parle bien de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, décrétée comme le seul « remède » efficace pour « un règlement définitif » de la crise de la dernière décennie. Poursuivant son analyse, l'ancien chef de gouvernement soulignera l'échec de l'Algérie dans ses projets de développement, d'adaptation aux règles de la mondialisation et du multipartisme. Au point qu'elle se trouve une nouvelle fois dans l'impasse et dans une situation de blocage qu'elle n'a jamais connue par le passée. M. Hamrouche, qui a drivé le gouvernement au moment où l'Algérie s'ouvrait sur la démocratie, trouve que même si l'Algérie dispose de mannes financières jamais égalées, cela ne servira à rien. « Ne soyez pas séduits par les sacs de dollars. Nous ne faisons pas ce que nous voulons de notre argent », précise-t-il avant d'ajouter que « la prise de décisions sur les dossiers chauds et importants se fait hors des cercles officiels ». Ainsi et tenant compte de cette réalité, M. Hamrouche dira que « la compétition politique est quelque chose de fictif » en Algérie. Selon lui, pour arriver à instaurer un climat de compétition politique, il faut qu'il y ait d'abord un multipartisme dans « les idées et la proposition de solutions ». Mais aussi, il faut que le choix de l'électeur soit respecté ainsi que l'opinion des citoyens. Dans le même sillage, M. Hamrouche évoque la délimitation de l'exercice du pouvoir. Sans cela, M. Hamrouche pense que les gouvernants piétineraient les gouvernés. Il cite ainsi le cas de l'Algérie où les limites sont franchies. « On utilise l'argent et les deniers publics sans la moindre considération au véritable propriétaire, le citoyen-électeur », indique-t-il. Le conférencier souligne également que « celui qui détient le véritable pouvoir (émanant du peuple) n'est pas celui qui agite la matraque, mais plutôt c'est celui qui a la sympathie des citoyens ». Là aussi, M. Hamrouche fait allusion à la gestion répressive des manifestations populaires qui tournent souvent à l'émeute.