Les acteurs impliqués dans la production laitière ont accueilli avec appréhension les résultats de la filière fournis la semaine dernière par les différents services affiliés au ministère de tutelle. Certes, des progrès au niveau de la production sont enregistrés, mais éleveurs, collecteurs et associations professionnelles mettent en exergue des embûches qui entravent encore la filière à des niveaux divers. Interrogé sur l'impact des mesures de soutien déployées par les pouvoirs publics en vue d'encourager l'élevage bovin laitier, le président de l'association des éleveurs producteurs de lait de la wilaya de Béjaïa estime que «les moyens sont là mais ils sont très mal répartis ; avec des chiffres à l'appui, des indus éleveurs ont profité des facilitations accordées à l'importation pour acquérir des vaches laitières pour les détourner à la fin. Très peu ont maintenu leur élevage.» En ce qui concerne les contre-performances qui persistent au niveau de la collecte et de l'intégration du lait cru dans le processus de l'industrialisation, il fait savoir que «les collecteurs souffrent le martyre avec les laiteries, accusant des retards énormes dans les paiements, cependant la marge bénéficiaire du collecteur est très faible comparativement aux coûts.» A combien est estimé le rendement moyen par vache laitière en Algérie et quelles sont les raisons des contre-performances en la matière ? En réponse à cette question, un gérant d'une exploitation d'élevage de la même région souligne : «Le rendement moyen par vache est loin d'être performant, se situant actuellement entre 12 et 15 litres/jour. La cherté de l'aliment en est la cause directe. Cette moyenne pourrait atteindre facilement les 25 l/j avec une alimentation adéquate. J'entends par là un soutien de l'Etat pour la production de fourrage, semence, gas-oil, etc.» échec du recours à l'importation de vaches D'autres contraintes tirent vers le bas également la productivité des élevages. C'est le cas, a-t-il ajouté, «des bâtiments qui ne répondent pas aux normes, des chaleurs excessives ou le froid influant négativement sur le bien-être des animaux et, bien évidemment, sur leur rendement. Il y a aussi le manque de suivi nutritionnel en apport vitamines et de soins vétérinaires réguliers, des fièvres récurrentes ou des maladies multiples qui frappent fréquemment les bêtes entravées.» L'autre contrainte majeure soulevée par les éleveurs interrogés est relative à l'accès au crédit d'exploitation pour la modernisation des élevages. A cet égard, un éleveur de la région de Tizi Ouzou estime que «l'accès au crédit reste difficile pour les agriculteurs, malgré les promesses faites par les pouvoirs publics ces dernières années, et ce, en raison de multitudes de document exigés par les banques, notamment les titres de propriété, sachant qu'en Kabylie, par exemple, le problème de la titrisation foncière est très épineux.» De son côté, un agronome gérant un cabinet de conseil en agriculture rejette l'idée du recours à l'importation de vaches laitières, préconisée comme solution pour l'amélioration de la productivité de la filière. Il estime que «l'importation de vaches destinées à la production laitière est un projet avorté, compte tenu du manque de formation de nos éleveurs, de l'état des bâtiments qui sont loin de répondre aux normes. Ceci dit, au lieu de s'aventurer avec de l'importation du cheptel, mieux vaut encourager la production de vêles localement avec l'encouragement de l'insémination artificielle, ce qui nécessite évidemment une bonne formation de nos éleveurs. Le développement de race locale, telle que La Brune de l'Atlas ou la Guelmoise, très productive et rustique à la fois est aussi une solution idoine. Pour ce qui est des vaches importées, seule la Momtbéliarde en élevage extensif peut s'adapter à nos reliefs ou la Prim-Holstein en hors-sol.»