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Quelles orientations stratégiques pour notre pays ?
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Publié dans El Watan le 11 - 02 - 2013

Depuis plus de deux décennies, les experts et les analystes algériens réclament la conception et la diffusion d'une vision à long terme du devenir de notre économie. Les hommes d'affaires en ressentent la nécessité. Les pouvoirs publics n'ont jamais nié officiellement l'importance d'une telle démarche. Mais les nombreuses urgences, la gestion d'un quotidien trop volatile et parfois une relative aisance financière repoussent aux calendes grecques une telle activité. Elle paraît même superflue à un certain nombre de décideurs. Et pourtant ! Nous allons faire face en quelques années, probablement une dizaine tout au plus, aux défis les plus complexes, les plus incertains et les plus dangereux depuis notre indépendance. Voilà un échantillon de menaces qui pourraient exacerber nos vulnérabilités si une stratégie de riposte n'est pas conçue et exécutée le plus rapidement possible.
Les crises mondiales deviennent plus étendues et plus fréquentes que par le passé. Nous allons dépasser le seuil de 50 millions d'habitants. Le marché mondial de l'énergie n'a jamais été autant incertain : nous pourrions réduire les quantités exportées de 50% pour satisfaire la demande nationale, au moment où les prix chuteraient de 60% (scénario le plus pessimiste). Nos citoyens attendent de l'Etat le règlement de tous leurs problèmes économiques et sociaux au moment où la productivité globale des facteurs chute. Nous avons volontairement décrit le scénario de la situation la plus sombre possible, car une bonne stratégie consiste à anticiper la plus mauvaise donne et y riposter pour l'avorter et réduire ses impacts les plus négatifs.
De la nécessité à l'action
Il n'est nullement dans nos intentions de dérouler un cours de stratégie d'entreprise et encore moins de développement des nations. Les écrits sur ces deux thèmes sont abondants. Par contre, l'application de certains principes stratégiques, au contexte spécifique de notre pays, s'impose. En premier lieu, nous n'avons pas encore monté une «institution cerveau» qui dispose des compétences, des moyens et des pouvoirs de concertation et de conception d'une telle démarche. La première étape consiste à identifier les grandes priorités politiques qui vont guider les décisions de conceptions et de mise en œuvre. Nous pouvons en citer quelques-unes. Nous désirons construire une économie de marché sociale et efficace qui consacre le principe de l'égalité d'opportunités. Il est vital de construire une économie productive hors hydrocarbure dans la prochaine décennie. Nous voulons être un pays émergent en 2025 et une nation développée en 2040.
Les politiques publiques visent autant que faire se peut l'équilibre régional et la valorisation de toutes nos potentialités. Les choix politiques transcendent les décisions techniques. La classe politique fixe les orientations générales et en contrôle les résultats à travers diverses institutions. Lorsque les directives politiques sont claires, l'étape du choix des secteurs prioritaires à développer n'est pas encore arrivée. C'est une erreur trop souvent commise dans de nombreux pays. On lance des programmes pharaoniques, tout en oubliant de mettre sur pied les conditions de réussite.
Bien que les différents plans de relance ne constituent pas un plan stratégique, la même maladresse fut commise. On a omis ou considéré comme peu importantes les conditions sine qua none de réussite. Elles sont au nombre de trois : des ressources humaines de très grande qualité (pas quantité) ; un management d'entreprises et d'institutions publiques de classe mondiale ; et enfin un climat des affaires des plus sain qui consacre la concertation et la libération des initiatives. A travers ces trois axes, il est question de prioriser des activités qu'on a négligées par le passé et qui sont les secrets des réussites des pays comme la Chine, la Malaisie, la Pologne et le reste. Nous parlons des recyclages des personnes opérationnelles, de la modernisation de nos TIC, de la dé-bureaucratisation, du développement local, de la modernisation bancaire, de la priorisation de l'acte d'investir sur l'acte d'importer, etc. Sans mettre en place ces dispositions, n'importe quelle stratégie échouerait. Nous en avons fait l'amère expérience avec des plans de relance qui négligent les conditions de réussite.
Quelles activités privilégier ?
Dans de nombreux débats nationaux, cette question vient toujours en priorité : quels sont les secteurs qu'il faut développer ? Deux observations de fond s'imposent. En premier lieu, si les conditions préalables (ci-dessus) ne sont pas satisfaites, n'importe quel choix d'activités déboucherait sur un échec : comme l'expérience du développement par les infrastructures. Aucun pays ne s'est jamais développé avec des ressources humaines sous-qualifiées. En second lieu, de nombreux pays créent ces conditions de développement, améliorent le climat des affaires et laissent les entrepreneurs choisir librement les secteurs où ils seront les plus compétitifs.
Cette manière de faire consiste à libérer les initiatives et le dynamisme et le développement s'ensuivront. Par contre, d'autres pays préfèrent concevoir des politiques économiques qui identifient ces secteurs. Pour notre pays, une telle démarche semble réunir plus de consensus. Elle peut fonctionner si les conditions préalables sont réunies. On devrait alors commencer par regarder la balance des paiements et voir les postes qui ont explosé et pour lesquels nous pouvons effectuer des investissements de substitution : blé, lait, médicaments, Hi-fi, services (construction).
En second lieu, nous avons des activités où les dotations naturelles, exploitées judicieusement, peuvent nous permettre de récupérer une part non négligeable des marchés mondiaux : primeurs, agriculture bio, tourisme, activités minières, etc. Dans le domaine de l'énergie, nous devons avoir un bouquet plus diversifié qui inclurait les énergies renouvelables et le schiste (si on prouve qu'il est non polluant pour nos sites). Mais il reste que de nombreuses activités peuvent être identifiées par cette «institution» qui nous fait cruellement défaut.
Il faut une forte dose de volonté politique pour mettre en place l'organisation institutionnelle et les mécanismes susceptibles de concevoir et d'exécuter une stratégie concertée, cohérente et ouverte. C'est à ce prix-là qu'un pays à niveau de fonctionnement médiocre pourra devenir moyen, puis émergent et enfin développé.


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