Les performances de l'économie algérienne reposent depuis quatre ans sur un cocktail détonant de la conjoncture mondiale dont le principal contrecoup est le cours inespérément élevé du pétrole. Conjoncture durable ? Les premières prévisions sur 2007 nous disent beaucoup oui et un peu non. 2003, 2004 et 2005 ont été les années les plus prospères de l'économie mondiale depuis la Seconde Guerre mondiale. En valeur absolue, jamais autant de richesses nouvelles n'avaient été crées en une période triennal sur la planète. Bémol connu de tous, les ressorts de la croissance dans les pays les plus industrialisés - deux tiers de l'activité mondiale - ont été dopés à la vitamine du crédit. Toute la question de ce premier trimestre 2006 était alors de savoir quand et comment aller s'opérer la cure de désintoxication à la stimulation artificielle de la consommation. Car tous les spécialistes s'accordaient à dire que cette cure est inévitable, les seuils d'endettement à la fois publics et des ménages ayant atteint la côte d'alerte. La première grande indication sur l'évolution de la conjoncture mondiale est venue comme d'habitude des Etats Unis ou la FED, la banque centrale américaine a entamé une nouvelle politique de resserrement progressif du crédit en relevant pour la première fois depuis neuf ans son taux directeur. Le crédit sera moins bon marché. La priorité du soutien à la consommation et donc à l'activité est finie. Et pas seulement aux Etats-Unis. Le Japon également estime ne plus devoir soutenir son activité affligée par un cycle déflationniste de huit ans. La banque du Japon a annoncé le resserrement du robinet du crédit. La zone euro s'est déjà alignée. Partout la tendance sera donc à la remontée des taux d'intérêt. De même les politiques monétaires et fiscales cesseront d'être stimulante de l'activité. Il s'agit partout de réduire les déficits creusés ces dernières années. Exemple l'Allemagne relève sa TVA de 16% à 19% pour faire face à des dépenses budgétaires elle-même confinées. Les taux à long terme qui ont tant soutenu le gonflement de la bulle immobilière vont eux aussi se redresser lentement et ralentir la spirale montante du marché de la pierre. De manière générale les ménages aux Etats-Unis, au Japon et en Europe devraient se sentir moins confortés dans leur élan à la consommation ou à l'acquisition de biens immobiliers. Il faut bien garder en tête que le prix de la pierre a doublé en dix ans dans les pays développés aux Etats-Unis grâce à l'épargne asiatique - donnant aux propriétaires un réconfort patrimonial qui a encouragé leurs dépenses de consommation en général et leur inclinaison à s'endetter. Les effets de " richesse immobilières " s'épuisent, Un sentiment annonciateur, pour les prévisionnistes, d'un tassement de la croissance dans ces pays car l'investissement des entreprises peut tout au plus amortir la décélération. Tout cet emballement tire à sa fin et l'année 2006 s'annonce comme celle du début de l'atterrissage, 2007 se présentant comme celle dune croissance amaigrie de ses graisses financières. La part grandissante des pays émergents Le ralentissement annoncé de la croissance en 2007 dans les principaux pays industrialisés aura-t-il des conséquences dommageables sur l'autre pôle de la croissance mondiale ; l'Asie et les pays émergeants ? La croissance américaine en 2005 n'aurait, selon Merril Lynch, atteint que 1,5 % au lieu de 3,5% si les ménages américains n'avaient pas massivement empruntés. Transposée à l'échelle des flux commerciaux cette estimation indique bien qu'un ralentissement du soutien financier à la demande intérieure américaine et occidentale retentirait sur les économies asiatiques qui tirent une partie importante de leur dynamisme des exportations vers ces marchés. Illustration de cette dépendance à " l'international ", l'excédent commercial chinois du seul mois de janvier 2006 a progressé de 47% passant de 6,5 millions de dollars à 9,5 millions de dollars. Alors coup d'arrêt à la croissance forte dans les pays émergeants en 2007 ? Pas si sûr. La demande intérieure décolle partout dans ces pays : le Brésil, l'Afrique du sud, l'Europe de lest. Cette demande est même orienté vers des biens à forte valeur ajouté et devrait contribué à son tour à soutenir les exportations industrielles des pays développés. Nouvelle illustration avec la Chine, le maintien de l'investissement à un rythme élevé profite aux exportations de machines outils japonaises à nouveau en hausse en 2006. Résumons nous. 2007 ne pourra plus profiter des largesses financières, monétaires et fiscales de la première moitié de la décennie 2000 qui ont eu pour effet de booster l'activité mondiale à des niveaux sans précédents. Mais les coussins d'atterrissage sont là pour éviter la chute brutale. Parmi cela, la bonne santé financière des entreprises dans les pays développés, et la bonne santé de la demande intérieure sans dopage excessive par le crédit dans les pays émergeants. Les premières vont continuer à investir même si les effets emplois ne seront pas très importants car la priorité est donnée aux dépenses de productivité. Les seconds vont poursuivre leur percée dans l'économie mondiale. Leur poids dans la croissance mondiale est d'ailleurs reconsidéré lors qu'il est approché non plus par dollars courants mais par parité de pouvoir d'achat. Le poids des pays émergeants dans la croissance mondiale en 2005 était selon la seconde méthode de calcul, non plus de 25% mais de 50%. C'est d'ailleurs de là que vient l'espoir de l'Algérie de voir les cours du brut restées hauts. Le risque " géopolitique " s'épaissit Les cours du brut ont entamé ce second trimestre de 2006 par de nouveaux records historiques. Les spécialistes attribuent ce nouvel emballement aux tensions géopolitiques. Même les chiffres particulièrement rassurants pour les consommateurs- des réserves américaines n'apportent pas un souffle de détente sur les cours. La montée puis la fermeté des cours, qui fait la prospérité de l'économie algérienne depuis quatre ans, repose sur plusieurs raisons dont lune, peu négligeable, est l'entrée en force de la demande énergétique des pays émergents sur le marché mondial. Aussi la prospective de la conjoncture algérienne des prochaines années va intégrer non plus seulement la vigueur de la croissance et donc de la demande énergétique dans les pays industrialisés, mais aussi, et de plus en plus, celle des pays émergeants dont les incidences touchent aussi les autres matières premières et les demi produits comme le montre la remontée spectaculaire du prix de l'acier. L'économie mondiale portera donc encore en elle, malgré un ralentissement donné pour inévitable en 2007, la dynamique qui a tant profité à la valorisation des hydrocarbures ces dernières années. Le risque d'un atterrissage avec secousses n'est pas tout à fait écarté pour autant. Le comportement des consommateurs américains en particulier pourrait, s'il devait se retourner totalement, mettre à la peine les chiffres d'affaires de quelques fleurons de Wall Street et entraîner quelques banques avec elles. En fait le plus grand danger sur la croissance mondiale, outre le surendettement américain, provient de la peur du chaos géopolitique dans lequel l'Amérique de Bush menace de plonger le monde en échafaudant à deux pas d'un Irak en feu - un plan d'intervention pour empêcher l'Iran d'accéder à la technologie nucléaire. Les grands conflits commerciaux comme celui qui a opposé la Chine à l'Occident à la fin du traité multifibre en janvier 2005, arrivent encore à être réglés sans gros dommages. Le monde n'a pas la même recette face aux projets de guerre américains.