Au vu des événements des dernières 48 heures, la situation n'est pas à la décantation à Sidi Amar (Annaba). Depuis samedi, cette commune proche de quelques centaines de mètres du complexe sidérurgique Ispat El Hadjar connaît des débuts d'émeute à l'origine du décès accidentel d'un enfant de 11 ans. Il avait été écrasé par un tube de gros diamètre que des émeutiers avaient installé pour bloquer la circulation. Vingt-quatre heures avant, Aïssa Menadi, le secrétaire général du conseil syndical Ispat, affirmait, devant un parterre de journalistes, qu'il avait été victime d'une tentative d'agression à proximité de son domicile et qu'un des syndicalistes avait été blessé au bras par un toxicomane meneur des émeutiers. Hier, en après-midi, la situation était toujours explosive. Dans la matinée, les jeunes chômeurs sont revenus à la charge. Ils ont dressé des barrages composés d'objets hétéroclites et ont incendié des pneus sur tout le parcours menant du siège de l'APC au complexe sidérurgique. La présence de la brigade antiémeute de la Gendarmerie nationale (toujours en alerte à 18h), ajoutée à l'appel à la sagesse des officiers et de quelques élus ont permis d'éviter le pire. Tous ces événements faisaient suite à la décision des travailleurs du complexe de débrayer à partir de 2h pour, affirmeront les syndicalistes signataires du communiqué, « apporter spontanément leur soutien aux membres du conseil syndical et à leur secrétaire général Aïssa Menadi, démissionnaires depuis le 28 août 2004 ». Un débrayage que les jeunes de Sidi Amar ont qualifié de provocation parce qu'intervenant quelques heures à peine après l'enterrement du petit enfant en présence d'une foule imposante. D'autant plus provocateur, selon de nombreux jeunes, que ce sont quelques grévistes virulents et hommes de paille de Aïssa Menadi qui ont imposé aux autres travailleurs de suspendre leurs activités sous peine d'être agressés. « Ce sont ceux-là mêmes qui abandonnent leur poste de travail pour s'adonner au trafic et prêter main forte au syndicat Ispat en cas de besoin, comme c'est le cas ces derniers jours », ont avancé plusieurs manifestants, dont des pères de familles depuis des années au chômage. « Ils ne nous impressionnent pas. Qu'ils fassent leur grève, qu'ils paralysent le complexe, peu nous importe du moment que la rentabilité ou non du complexe ne nous intéresse pas. Dans cette société, il n'y a pas de syndicalistes. Ce ne sont que des affairistes. Ces pseudo-syndicalistes affirment que les jeunes manifestants sont manipulés par la mafia de l'acier. En fait, ce sont eux qui composent cette mafia pour se permettre des voyages à l'étranger, des avantages financiers et matériels et recruter qui ils veulent », a affirmé Djeraïria, un des manifestants. Comme attendu, les syndicalistes sont revenus sur leur décision de démissionner en bloc. On se rappelle que Aïssa Menadi avait déclaré que sa décision était irrévocable et qu'il n'y reviendrait pas, même si Sidi-Saïd le lui demandait. « Eu égard à l'intervention du secrétaire général de l'UGTA et à la demande des travailleurs qui ont débrayé, les membres du bureau syndical et leur secrétaire général ont décidé de surseoir à leur démission et ont décidé de reprendre leurs activités syndicales », indique le communiqué du syndicat Ispat transmis à notre rédaction. Apparemment confortés par la grève qu'ils affirment avoir été spontanément déclenchée par les travailleurs du complexe et suivie par beaucoup d'autres des entreprises implantées dans le périmètre de la plate-forme syndicale de Sidi Amar, les syndicalistes veulent davantage démontrer leur puissance et leur invulnérabilité. Dans leur communiqué, ils ont souligné : « Le syndicat Ispat Annaba, pour sa part, se fait un point d'honneur à rappeler ce que les pouvoirs publics et l'opinion nationale savent déjà, à savoir le rôle déterminant joué par le secrétaire général de la centrale syndicale dans la relance du complexe sidérurgique... Le dernier mot de ce communiqué, nous le réservons à la mafia locale de l'acier ainsi qu'à tous ceux qui ont intérêt à ce que le syndicat Ispat faiblisse et baisse les bras. Vous ne réussirez pas dans votre sinistre entreprise qui est celle de casser le partenariat réussi. »