C'est la première fois dans l'histoire de la présidence italienne qu'un chef d'Etat accepte de briguer un second mandat. Giorgio Napolitano a été réélu, en dernier recours, pour sortir le pays du blocage dû au rejet de plusieurs autres candidatures, comme celle de l'ancien Premier ministre, Romano Prodi. Rome De notre correspondante Le vieux et pondéré homme politique, ne comptant pas déroger à la longue tradition de la République italienne, avait affirmé haut et fort : «Je ne désire pas être reconduit dans mes fonctions présidentielles.» Il avait opposé un «non» catégorique à l'invitation que lui avaient lancée avec insistance plusieurs hommes politiques et intellectuels pour prolonger son mandat et demeurer au palais Quirinal. G. Napolitano, 87 ans, aurait préféré passer le témoin à son successeur, mais l'éclatement du Parti démocrate (gauche) qui s'est divisé sur les différentes candidatures et la position ferme de la droite qui avait manifesté, vendredi, face au Parlement pour empêcher l'élection de Romano Prodi, ont abouti à une préoccupante impasse politique qui menaçait de geler le fonctionnement des institutions. Sous la pression des différentes forces politiques, y compris le parti de Silvio Berlusconi (Peuple de la liberté), le chef de l'Etat sortant a consenti à présenter sa candidature devant le Parlement. Seul le Mouvement cinq étoiles a critiqué ce choix, le définissant comme «un coup d'Etat». En Italie, le président de la République est désigné par le suffrage universel indirect ; seuls les grands électeurs (députés, sénateurs et délégués régionaux), au nombre de 1007, peuvent voter pour son élection. Après trois jours de vote, aucun candidat n'a obtenu le quorum requis (504 voix) et l'échec de l'élection de l'ancien président de la Commission européenne, R. Prodi, a sonné le glas du PD, entraînant la démission de sa présidente Rosy Bindi et de son secrétaire national Pierluigi Bersani. Ce parti de centre gauche avait remporté une courte victoire aux élections législatives de février dernier, sans disposer toutefois de la majorité suffisante pour former un gouvernement. Par conséquent, deux mois après le vote, l'Italie demeure toujours sans Exécutif. Cette situation inextricable a rendu l'élection du chef de l'Etat une véritable bataille de tranchées où la gauche, la droite et le parti populaire Mouvement cinq étoiles de l'ancien comique Beppe Grillo se sont affrontés, sans exclusion de coup bas, mais sans réussir cependant à élire un nouveau Président. Face à ce constat d'échec, les leaders politiques ont renouvelé, hier, leur appel désespéré au chef de l'Etat sortant, qui a cédé à la pression, affirmant «ne pas pouvoir se soustraire» à cette «responsabilité». G. Napolitano a été élu au sixième scrutin. Le fait est tellement inédit que les constitutionnalistes italiens se sont demandés, hier, s'il était nécessaire que M. Napolitano prête serment de nouveau et s'il fallait modifier la cérémonie de la passation de pouvoir. Dès sa réinvestiture, le chef de l'Etat devra, inexorablement, trancher le dilemme : charger les partis de former un gouvernement d'entente nationale ou dissoudre le Parlement et convoquer des élections anticipées.