Le nouveau gouvernement de coalition, voulu par le chef de l'Etat Napolitano, fait la part belle à la droite, qui avait pourtant perdu les élections de février passé. Berlusconi, donné pour «mort» par ses détracteurs, a réussi un coup de maître, en plaçant ses hommes à la tête des ministères-clés et en bloquant la nomination des dirigeants historiques du Parti démocrate de gauche. Rome (Italie). De notre correspondante Les ministres du nouvel Exécutif avaient commencé, depuis quelques minutes, à prêter serment au palais de la présidence, lorsqu'un passant armé, arrêté par la suite, a ouvert le feu sur les carabiniers postés à l'entrée du palais du gouvernement, blessant deux d'entre eux. Cet incident a perturbé la cérémonie qui se déroulait au palais Quirinale et les organisateurs ont décidé d'annuler les festivités qui devaient succéder à l'événement. Ce fait divers grave n'a toutefois pas empêché les Italiens de se réjouir d'avoir finalement un gouvernement pour résoudre les problèmes du pays, après la tourmente politique qui a succédé aux élections législatives de février passé. Ceux qui s'étaient étonnés de la jubilation de l'ancien Premier ministre, Silvio Berlusconi, devant la réélection de Giorgio Napolitano (homme politique issu de la gauche) à la présidence de la République, ont trouvé depuis réponse à leur stupeur. La reconduite du président Napolitano a bénéficié à un Berlusconi que beaucoup donnaient pour «forcé à la retraite», au lendemain des élections législatives remportées par la gauche avec une courte majorité. Le Parti démocrate, qui n'avait pas réussi à convaincre le Mouvement Cinq Etoiles de l'ancien comique Beppe Grillo à sceller une alliance pour un exécutif de gauche, s'est résigné à accepter un gouvernement d'union avec la droite, conduit par Enrico Letta. Ce jeune dirigeant, de 46 ans, (dans la politique italienne, la moyenne d'âge est de 60 ans) du parti et ancien ministre avait été chargé, à 46 ans, par le chef de l'Etat de former rapidement un gouvernement. Il a engagé des négociations avec le parti le Peuple de la liberté de Berlusconi, qui, en homme politique rusé, a réussi le coup de force de placer son homme de confiance, Angelino Alfano, au poste sensible de vice-président du Conseil et ministre de l'Intérieur. D'autres postes ministériels importants, comme ceux des Réformes constitutionnelles, de l'Agriculture, de la Santé, des Transports et infrastructures sont revenus à d'autres responsables du PDL. Sur vingt et un ministres, Letta a nommé sept femmes à des fonctions sensibles, comme la justice, la santé, l'agriculture, l'enseignement... Mais c'est la diplomatie qui voit arriver une militante rodée aux vicissitudes de la politique, la féministe Emma Bonino. Issue du Parti radical, cette activiste des droits de l'homme connaît bien les rouages des Affaires étrangères. Ancienne commissaire européenne, chargée de l'aide humanitaire et ancienne ministre du Commerce extérieur dans le gouvernement Prodi de 2006, Mme Bonino, 65 ans, connaît bien le Monde arabe qu'elle a longuement sillonné. Excellente francophone, elle avait effectué un long séjour au Caire pour apprendre la langue arabe. En juin 2007, alors qu'elle était ministre du Commerce extérieur dans le gouvernement de Romano Prodi, elle a visité l'Algérie avec une délégation d'entrepreneurs italiens (voir entretien El Watan du 6 juin 2007). Une autre femme, au parcours atypique, a été nommée dans le gouvernement Letta. Chargée de l'intégration, Cécile Kyenge, 48 ans, médecin ophtalmologue, originaire du Congo (ex-Zaïre), avait rejoint le Parlement par le PD, lors des dernières élections. Première ministre noire de l'histoire de la République italienne, elle a annoncé vouloir œuvrer pour introduire «le droit du sol» en Italie, c'est-à-dire le droit aux enfants nés en Italie de parents étrangers, d'obtenir la nationalité italienne. Le médecin d'origine africaine a également affirmé vouloir activer pour une révision de la loi sur l'immigration. La réaction négative du parti xénophobe de la Ligue du Nord ne s'est pas fait attendre. Critiquant la nomination de la militante de couleur, les dirigeants de ce parti sont scandalisés : «Mais ce n'est pas une Italienne.» Ces derniers ne se sont pas rendu compte qu'il y a une autre femme d'origine étrangère parmi les nouveaux ministres. La blonde Josefa Idem, ancienne championne olympique, nommée ministre du Sport et de la Jeunesse, est née en Allemagne, son pays d'origine.