Les mannequins ont défilé au rythme d'une musique mixte, rehaussée par le spectacle grandiose que déclinait la vallée du Rhummel, embrumée dans les ors et les pastels du crépuscule printanier. Le public constantinois a eu droit à deux défilés de mode lors des Journées de la mode franco-algérienne, mardi et jeudi soir, à l'Institut culturel français et à l'hôtel Novotel. C'est désormais une tradition, car pour la première édition, c'est la ville du Vieux rocher qui en a eu la primeur en 2010, à l'initiative de l'Institut français et TV5. Quatre stylistes, deux Françaises et deux Algériennes, ont présenté leur collection dans une ambiance romantique, au rythme d'une musique mixte, mêlant swing, fugues classiques et mélodies orientales, rehaussée par le spectacle grandiose que déclinait la merveilleuse vallée du Rhummel embrumée dans les ors et les pastels magiques du crépuscule printanier. Les magnifiques collections de Soraya Khaled (Alger), Karel Mills (Paris), Elodie Viens (Marseille), et Mabrouka Saouli (Annaba) ont été présentées par onze mannequins venant de Guinée, Cameroun, Ukraine et d'Algérie (Alger et Oran). Soraya Khaled, digne élève de la maison Lesage Broderie, perpétue l'art traditionnel, avec des modèles revisités, inspirés de toute l'Algérie : caracos brodés de fils d'or, sarouals, caftans, robes du soir, coupés dans du velours, du brocard, de la soie fine, du lin de soie, des voilages, etc. Elodie Viens, elle, a marqué de son empreinte, «Nacritic», avec ses petites robes fluides de nymphes virginales, dans les tons écrus et blancs, usant de tulles et dentelles, sans autre ornement que des couronnes de fleurs en serre-tête. Ses mannequins évoluant pieds nus, appuyant ainsi le côté nature et dépouillé de sa création. Mabrouka Saouli est un vrai personnage, tout un spectacle à elle seule, avec ses exubérantes boucles blondes, son regard bleu vif et son pantalon de combat style «para». Il ne peut donc en sortir que des poèmes en guise de modèles : jupes courtes immodérément garnies de fleurs — véritables jardins flottants — sarouals, jambières, coiffes excentriques, le tout dans la rutilance des «Mille et Une nuits». «Je suis une séditieuse, une narcissique, j'adore bousculer les idées reçues, séduire, étonner. L'amour des fleurs, je l'ai hérité de mon enfance passée à Besbès (Annaba)», nous-a-t-elle confié en coulisse. Karel Mills, une très jeune femme qui a réussi à déposer sa marque il y a 3 ans, fait dans le prêt-à-porter : petites tenues de bureau pouvant aisément se convertir en toilettes de soirée pour peu qu'on leur adjoigne un accessoire. «Mes modèles se veulent intemporels, élégants et confortables», avoue-t-elle. A travers l'intérêt du public, il est permis de croire que l'Algérie, et en l'occurrence Constantine, est en train de renouer avec son élégance d'antan. La jeune et belle Algéroise, Yasmine Ferhani, mannequin et animatrice de la rubrique Mode et beauté, sur Canal Algérie, est très optimiste à ce propos. Malgré les difficultés liées au métier de mannequin dans notre pays, elle a réussi, grâce à sa ténacité, son intelligence brillante et bien sûr sa classe innée, à faire des émules. Elle est un bel exemple pour beaucoup de jeunes Algériens, qui n'hésitent plus à faire carrière dans ce métier. «Je me vois comme ambassadrice de mon pays dont je présente toute la beauté, la richesse et la diversité à travers les tenues que je mets en valeur. Je forme à mon tour d'autres jeunes, car c'est un métier très noble qui encourage la création», nous dit-elle. Marie-Claude, une ravissante Guinéenne, étudiante, boursière en communication (master 1), à Sidi Bel Abbès, est arrivée au mannequinat par le biais d'une agence algérienne. Elle nous en parle : «C'est ma sœur qui m'a inculqué le goût de la mode et de l'élégance. Quand j'ai été reçue au casting, j'ai découvert que j'aimais l'esthétique et le contact avec les créateurs de tous les pays.» La direction artistique de la manifestation a été menée sous la férule du grand styliste sud-coréen, Seong Bo Yun, célèbre par sa griffe, dont la boutique parisienne est investie par un nombre impressionnant de fans. Monté à Paris, il y a 23 ans, pour y effectuer des études en littérature française, il y est resté finalement, puisqu'il y a trouvé sa voie : la création dans le domaine de la mode. Son style participe du «dandy-rock, d'un certain luxe intérieur, exigeant, à la fois romantique et rigoureux», comme il nous l'a expliqué lors des répétitions, auxquelles il nous a cordialement fait assister.