The rising continent». Un continent émergent. Le Japon, comme les puissances occidentales, croit aussi à l'idée que l'Afrique est le continent du futur où vivront 2,2 milliards d'humains en 2050. Réservé jusque-là, Tokyo vient de passer la vitesse supérieure pour trouver place en Afrique en passant par le couloir de l'économie et de la sécurité. Il est déjà devancé par l'Inde, la Chine, les Etats-Unis, la France, le Brésil, la Russie, les Emirats arabes, l'Arabie Saoudite… A la cinquième conférence internationale de Tokyo pour le développement de l'Afrique (Ticad), qui se tient à Yokohama, Shinzo Abe, Premier ministre, a annoncé que son pays va débloquer une somme de 24,2 milliards d'euros pour soutenir la croissance économique des pays africains. Moins de la moitié de cette somme, la plus importante jamais dégagée par le Japon, ira pour l'amélioration de la santé, de l'éducation, de la formation des jeunes et de l'alimentation. Le Japon souhaite appuyer les pays du continent à mieux se doter d'infrastructures et de réseaux de distribution électrique. La finalité est stratégique. La diplomatie du pays du Soleil-Levant entre donc dans un nouvel âge. Surtout que Tokyo envisage de densifier sa coopération sécuritaire avec l'Afrique. Le Japon a bien appris la leçon de l'attaque sanglante d'In Amenas, dans le Sud-Est algérien en janvier dernier, où il a perdu plusieurs ressortissants. Hors de question pour les Japonais de laisser «le terrain vide» aux autres pays. D'où cet intérêt pour la zone sahélo-saharienne et à sa «stabilisation». Tokyo va dégager une enveloppe de 750 millions d'euros en cinq ans pour soutenir les Etats de cette région secouée par la présence nocive de groupes armés d'origines diverses et d'identités parfois suspectes, à renforcer leurs capacités de lutte contre le terrorisme et les crimes transfrontaliers. A ce niveau-là, le Japon, qui se débarrasse graduellement du complexe du grand vaincu de la Seconde Guerre mondiale, marche sur les plates bandes des Etats-Unis et de la France. Mais les objectifs du Japon, fortement dépendant des matières premières africaines, ne paraissent pas les mêmes que ceux de Washington ou Paris. Le rapport à l'Afrique est moins complexe que celui de la France ou de la Grande-Bretagne, anciennes puissances coloniales, usant parfois de langage rappelant celui des anciens temps. L'histoire favorise donc clairement le Japon. Au même titre d'ailleurs que la Chine ou l'Inde. Les autorités japonaises veulent également rassurer les milieux d'affaires très regardants sur la situation sécuritaire en Afrique. Dans cet ordre d'idées, le Japon a installé une petite base militaire à Djibouti pour prévenir les actes de piraterie en mer Rouge et en océan Indien. Des actes qui ciblent prioritairement des bateaux commerciaux venant d'Asie. L'Asie qui désormais voit en l'Afrique l'allié idéal pour maintenir un certain niveau de croissance économique et de développement industriel. Et comme le Japon est en phase opérationnelle de redéploiement actif à l'international, Shinzo Abe a demandé aux dirigeants africains de soutenir la candidature japonaise aux Jeux olympiques de 2020. C'est le signe clair d'un Etat qui a une vision. Un Etat qui sait où il va…