Pour beaucoup,la crise provient des hallaba... à la différence que cette fois-ci leurs rangs ont été renforcés par de nouveaux trafiquants. «Non, ce n'est pas parce que Naftal opère moins d'enlèvements de carburant auprès de Sonatrach qu'il fait défaut aux stations-service. Nous autres, les cinq distributeurs privés de l'Ouest du pays, nous avons vu nos quotas d'enlèvement doubler depuis mai, ce qui, hors d'Oran, compense en grande partie la défaillance de Naftal», soutient un distributeur. Cette affirmation à bonne source contredit celle qui prétend que le mal à Oran proviendrait de l'inopérante décision des walis de Tlemcen et de Témouchent, celle-ci ayant enjoint aux stations-service de ne servir qu'un nombre maximum de litres de carburant aux automobilistes et camionneurs. D'aucuns ont pu constater que la source de tous les problèmes provient des hallaba depuis des années, à la différence que cette fois-ci leurs rangs ont été renforcés par de nouveaux trafiquants dont ce n'était pas l'activité. C'est même à Oran, Sidi Bel Abbès et Mostaganem qu'ils se déplacent. Leur astuce pour les véhicules de tourisme ayant des réservoirs de 200 l dont certains trafiqués (R 25, R 30 et Mercedes, ancien modèle). Ils ont doté leurs véhicules d'un réservoir GPL et roulent ainsi à bien moindres frais, ne consommant aucune goutte de la précieuse marchandise qu'ils transportent. Dans les wilayas limitrophes de Tlemcen, la situation est pire : «Dans certaines stations, les livraisons de carburant qui s'écoulait à la pompe en 8 h partent maintenant en moins de 2 h». La raison ? «C'est la forte demande au-delà de la frontière et l'augmentation du prix d'achat du litre, soit 100 DA et 120 respectivement pour le gasoil et le super !» Cette forte demande et le renchérissement des prix ont provoqué l'émergence de nouveaux acteurs dans le trafic sur le carburant. A cet égard parce que dans le bâtiment, les affaires sont moins juteuses, les camions des entrepreneurs ont été convertis à la «halba». Un de nos interlocuteurs nous invite à faire le compte : «un semi-remorque emportant 800 l de mazout à raison de 13,70 DA le litre et revendu à 100 DA l'un, ça rapporte combien ? Tous frais déduits comme ceux d'intermédiaires à la frontière, pour le propriétaire du camion cela rapporte 30 000 DA. Et avec trois rotations par jour au minimum, cela rapporte 90 000 DA, ce qui est nettement mieux qu'un transport de matériaux au mieux sur Oran et qui ne rapporte que 20 000 DA». A la question de savoir si les distributeurs ne sont pas complices, notre interlocuteur objecte : «Même si nous pouvions appliquer la circulaire du wali, on ne le pourrait pas pour deux raisons. La première, c'est que les hallaba ne sont pas des enfants de chœur, ils passent vite à la menace et comme nos agents sont sans protection, ils s'exécutent. Et ils s'exécutent d'autant plus volontiers que les hallaba se sont pris de les arroser par de généreux pour ne pas dire faramineux pourboires. Savez-vous qu'ils les ont tellement appâtés que ce sont les pompistes qui les alertent dès l'annonce d'une livraison de carburant. Vous les voyez parfois stationnés par dizaine sur les terre-pleins de stations où pourtant nulle goutte de carburant n'est disponible.» D'autres interlocuteurs parmi les usagers de la route mettent plutôt en cause l'absence de réaction de l'Etat : «Les décisions des walis de plafonner la distribution par véhicule, c'est la poudre aux yeux. Chacun sait qui est qui. On connaît les véhicules utilisés pour le trafic, ne serait-ce que ceux dont les réservoirs sont trafiqués, ce qui est interdit par la loi. Dans un pays aussi fliqué que notre pays, il est impensable de croire qu'on ne sait pas qui fait quoi. C'est la décision politique qui manque.»