Juges et avocats ont eu à redécouvrir, durant la matinée du jeudi, à Oran, un Syndicat national des magistrats (SNM) favorable au renforcement des droits de la défense, mais surtout un syndicat partisan d'un code de déontologie pour les magistrats. Lors de leur passage à Oran, les syndicalistes du SNM ont réitéré leurs convictions déjà exprimées dans les divers conclaves régionaux qu'ils ont enchaînés. Leur président, Djamel Aïdouni, s'est lancé, jeudi, dans un discours qui se veut « très réformateur ». Un discours ponctué de résolutions, plaidant en faveur « d'un soutien franc au projet de loi portant sur le droit de la défense » et il se montrera comme « un fervent partisan d'un code de déontologie pour les magistrats. Un code à instaurer en urgence ». Ce qui a sonné comme un véritable plaidoyer pour l'instauration de ces règles devant accélérer la réforme de la justice. C'est en tout cas ce qui a émaillé la rencontre organisée au musée du Moudjahid par le Syndicat national des magistrats, en collaboration avec les barreaux de l'Ouest sur le thème « La relation entre la défense avec l'appareil judiciaire ». Une première dans les annales des rencontres judiciaires, dans lesquelles le syndicat s'est montré « particulièrement sensible à la question des libertés de la défense ». Mais s'il est un sujet qui constitue le point d'achoppement pour l'indépendance des magistrats, c'est certainement le rôle du Conseil supérieur de la magistrature. Une instance dont le SNM dit « jouer en faveur du renforcement de la représentation des juges élus au détriment des représentants de l'administration ». Pour Djamel Aïdouni, « le SNM n'est pas étranger à cette évolution qui a consacré, pour la première fois, la suprématie - arithmétique s'entend - des magistrats élus au détriment des représentants de la chancellerie. Ce qui, en définitive, devrait renforcer l'indépendance des juges ». « Le SNM a investi dans l'idée d'un Conseil de la magistrature suprême qui incarnerait les principes éternels de l'indépendance des magistrats. Dès lors, ce conseil s'est voulu au-dessus de la mêlée politique. » Autre souci pour les syndicalistes du SNM : la charge vertigineuse du travail des magistrats. Un juge traite en moyenne quelque 700 dossiers par an. Une charge qualifiée d'« énorme ». Pour cela, le SNM plaide pour « une augmentation des effectifs des magistrats dont le nombre ne dépasse pas 3000 à l'échelle nationale. Se profile, donc, la nécessité de l'élargissement de la formation des magistrats ». De leur côté, les robes noires n'ont pas manqué d'exprimer leurs inquiétudes, formulées par maître Mahi Ghouadni, dont l'intervention a résumé les préoccupations des quelque 21 000 avocats exerçant en Algérie. « Il s'agit d'inquiétudes liées à la suprématie du parquet, ponctuée par des rapports trop souvent intimes entre le magistrat du parquet et celui du siège. » « Le rôle du parquet en Algérie est hypertrophié. » Voilà donc qui sonne comme une sentence. Ce qui amène cet ancien bâtonnier d'Oran à qualifier un tel appareil de « monolithique ». Le salut pour les robes noires passerait par « l'urgence de balayer les antagonismes entre les robes noires et les magistrats ». Les deux corporations ont décidé d'organiser une série de rencontres et ont projeté de mettre en place des structures communes chargées d'accueillir les doléances des uns et des autres. « Un projet pouvant jouer un grand rôle pour l'émancipation de la justice en Algérie », dit-on.