Errements idéologiques ? Calculs cyniques? L'opposition française ne cache plus son désarroi face au Front national. La nouvelle stratégie de François Fillon, qui a renvoyé dos à dos PS et FN en matière de sectarisme, divise son parti (UMP) et fait la joie de l'extrême droite. Paris (France). De notre correspondant L'agenda politique de François Fillon n'est pas aux municipales, tout est centré sur la présidentielle de 2017. Le leader de Force républicaine a provoqué un tollé à gauche et l'embarras à l'UMP en conseillant de voter «pour le moins sectaire» en cas de duel PS-FN au second tour des élections municipales de 2014. Et non, ce n'est pas un dérapage. En dépit des critiques, l'ancien chef de gouvernement a réitéré ses propos lors d'un déplacement dans les Alpes-Maritimes. Son camp se déchire, dérouté par cette volte-face de celui qui se présentait comme l'héritier du gaullisme. «Alerte rouge. Le vote FN est une ligne de fracture pour l'UMP. C'est notre pacte fondateur qui est en cause», a réagi l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac, Jean-Pierre Raffarin, sur son compte twitter. Au centre, le député UDI, Hervé Morin, a évoqué un vrai séisme pour la politique française. «Cela prouve que la décomposition de l'UMP n'est pas encore terminée. La majorité, il va la construire avec qui ? Avec le Front national ? Avec un tel discours, la droite va être dans l'opposition pendant 20 ans», a dit l'ancien ministre de la Défense qui a appelé les leaders de l'UMP à ramener François Fillon «à la raison». Le Front national se frotte les mains et ne boude pas son plaisir. Sa patronne a décidé de répondre par l'ironie. «Je l'ai entendu pendant de nombreuses années tenir un discours radicalement différent. Il fait de la course automobile, on appelle ça un tête-à- queue. Il est dans une tactique interne de combat avec M. Copé, ça m'intéresse assez peu. Objectivement, les électeurs de l'UMP comme ceux du PS en ont soupé de consignes de vote données par leurs élites.» Plus direct, Gilbert Collard, l'un des deux députés FN, a trouvé la bonne formule pour exprimer sa satisfaction : «On prend notre pied avec cet appel du pied.» La gauche s'étrangle de colère. «François Fillon franchit, pour des raisons de pur calcul politicien, un nouveau seuil, inacceptable, dans le rapprochement entre l'UMP et le FN. Ces propos répétés et assumés sont d'une gravité extrême. Nous demandons solennellement aux républicains de sa famille politique de les condamner. Il est urgent que M. Fillon mette fin à cette dangereuse dérive et qu'il renonce à une ligne politique inacceptable qui lève les dernières digues entre la droite et l'extrême droite», s'indigne Harlem Désir, secrétaire général du Parti socialiste. Pour de nombreux observateurs, la poussée du FN risque de créer de grandes tensions à l'UMP qui n'a jamais été claire sur la façon de contenir son extrême. Plusieurs sondages font état d'une importante progression de ce parti en vue des municipales de l'année prochaine.