Des observateurs estiment que les programmes pédagogiques sont chargés à tel point que les élèves, même les plus méritants, n'arrivent plus à suivre. Les cours de soutien particuliers seront bientôt réglementés. Des textes organiques visant à réguler cette activité sont en cours d'élaboration au sein du ministère de l'Education nationale. «Une note interne est actuellement en discussion, dont les détails seront rendus publics lorsqu'elle sera fin prête, et ce, dans quelques jours», affirme-t-on du côté du ministère. Et si l'orientation de cette «réglementation» n'est toujours pas clairement exposée par la tutelle, il semble évident que la tendance globale aille vers un durcissement de la «tolérance» jusqu'à l'heure manifestée à l'égard de ces cours particuliers. Du coup de pouce au business D'un simple «coup de pouce», il y a encore quelques années, uniquement destinés aux classes d'examen et aux matières principales, la généralisation s'est aujourd'hui faite à tous les paliers sans distinction. Autour de ce «business», un véritable phénomène de marchandage pédagogique, voire de chantage, s'est ancré dans les us et coutumes des écoliers. Les parents d'élèves, tout en cédant à cette école parallèle, n'ont eu de cesse de crier à la «malhonnêteté» et à «l'abus» des uns et des autres. Et le débat est aujourd'hui franchement ouvert, les autorités compétentes s'étant déclarées prêtes à rétablir «les équilibres» de l'équation scolaire. D'ailleurs, le ministre de l'Education nationale, qui a reçu samedi une délégation de la Fédération nationale des associations de parents d'élèves (FNAPE), a rassuré : «La lutte contre ce phénomène est lancée.» Le «ménage» avait commencé il y a quelques semaines, avec l'annonce de l'élaboration d'une circulaire adressée aux directions de l'éducation, et interdisant aux responsables administratifs des établissements scolaires et aux inspecteurs de dispenser des cours de soutien privés et payants aux élèves. Et il se poursuit, assure-t-on. «Le dossier des cours particuliers est à l'étude et fera l'objet de larges concertations avant l'élaboration des textes organiques pour lutter contre ce phénomène», a-t-il répondu, peut-on lire dans un communiqué repris par l'APS, aux membres de la FNAPE, qui avaient demandé de la «fermeté». Ces derniers ont «exprimé leur regret de voir le phénomène s'amplifier à tous les niveaux d'enseignement, appelant le ministère à adopter une position ferme pour mettre fin à cette situation qui constitue un danger pour la scolarité des élèves et menace la stabilité du secteur», est-il affirmé dans le document. Selon les spécialistes, le danger est plus perceptible qu'il paraît. «L'école ne joue plus son rôle», affirme le professeur Dalila Samai Haddadi, professeur en psychologie clinique à Bouzaréah.«Ce système, qui prend les élèves en otages, donne des enfants qui ne savent rien faire. Ils s'amusent et n'étudient pas durant la journée, pour ensuite travailler intensément le soir, pendant les deux heures que durent les cours de soutien», déplore-t-elle. Et le résultat est plus que néfaste pour eux. «Ce dont on ne se rend pas compte, c'est que ce sont ensuite des enfants surchargés que les parents récupèrent, des enfants qui sont en état de ‘‘burn-out''», déplore-t-elle. Et la psychologue, très critique, ne mâche pas ses mots. «Un Etat qui sait et qui accepte que des enseignants n'enseignent pas à l'école, mais retrouvent ensuite leurs élèves dans des caves, pour être payés une seconde fois en contrepartie de ce qu'ils sont déjà payés pour faire, est un Etat absent qui encourage la corruption», accuse Mme Haddadi. «Ethiquement parlant, on n'a pas le droit de prendre en otages les enfants qui n'ont pas les moyens de se payer ces cours. L'école publique est une institution de l'Etat et doit prendre en charge dans de très bonnes conditions l'enfant», martèle-t-elle. Réhabiliter les séances de rattrapage La solution serait donc, selon elle, l'instauration d'indications pédagogiques pour prendre en charge uniquement les enfants qui ont des problèmes scolaires. Certains pointent du doigt le programme pédagogique, trop chargé, selon eux, à un point tel que les enfants, même les plus méritants, n'arrivent plus à suivre et à assimiler leurs cours, se sentant vite «débordés». Raison pour laquelle d'autres plaident pour une réhabilitation des «séances de rattrapages scolaires». Idée à laquelle adhère le ministre du secteur, qui avait récemment affirmé que «des efforts seront déployés pour encourager les enseignants bénévoles à animer des cours de soutien gratuits au-delà de 17h dans les établissements scolaires publics».