François Hollande, qui a fait une escale à Bangui de retour d'Afrique du Sud, a estimé que l'opération était «difficile» mais «nécessaire pour éviter le carnage». Alors qu'elle ne s'en est pas encore sortie des sables mouvants maliens, l'armée française commence à s'enfoncer dans le bourbier centrafricain. Deux soldats ont déjà été tués dans la nuit de lundi à mardi au cours d'un accrochage avec des assaillants non identifiés dans un quartier proche de l'aéroport. Ce double meurtre qui a choqué la France est intervenu 48 heures après l'arrivée du contingent français à Bangui en provenance du Cameroun voisin. Le débarquement français en Centrafrique est décidément mal engagé. Le ministre délégué au Développement, Pascal Canfin, n'a d'ailleurs pas hésité à évoquer un «risque de guerre civile», évoquant «l'instrumentalisation» des affrontements entre communautés musulmane et chrétienne. «Il y a un vrai risque en Centrafrique. Il y avait et il y a encore peut-être un vrai risque de guerre civile», a-t-il déclaré à l'antenne de Radio France Inter. «C'est une situation complexe entre des communautés, des affrontements que certains voudraient voir dégénérer en affrontements religieux, les chrétiens contre les musulmans, alors que depuis des décennies, il y a en Centrafrique des chrétiens et des musulmans qui cohabitent. Tout cela est largement instrumentalisé», a-t-il ajouté, sans préciser la source de cette «instrumentalisation». Aussitôt après avoir obtenu le feu vert du Conseil de sécurité, la France a lancé son opération Sangaris en déployant 1600 militaires, en appui à une force africaine d'intervention, actuellement de quelque 3000 soldats, pour ramener le calme en Centrafrique. Mais le terrain semble miné dans la capitale centrafricaine livrée à la violence et au pillage. L'urgence d'un renfort européen Les soldats français étaient confrontés, hier, au défi d'éviter une généralisation des représailles contre les civils musulmans de la part d'une population chrétienne qui a été terrorisée pendant des mois par les exactions de combattants de l'ex-rébellion Séléka, en majorité musulmans, qui ont pris le pouvoir en mars 2013 et sont en cours de désarmement. «C'est notre responsabilité que de pacifier, de sécuriser et de remettre (en route) le fonctionnement de l'Etat et de la démocratie», a poursuivi M. Canfin. Mais pas seulement. L'Union européenne (UE) s'apprête à prendre part aux opérations militaires en République centrafricaine qui demeurent «beaucoup plus difficiles» que celles au Mali, a estimé hier le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian. Il a toutefois souligné l'impératif de créer une «force d'interposition strictement africaine». Pour lui, l'opération Sangaris en Centrafrique est certes «beaucoup moins onéreuse» que Serval au Mali, puisqu'il y a «moins d'armement, moins de transport, moins de logistique». M. Le Drian précise néanmoins qu'elle est «beaucoup plus difficile, parce que l'identification de l'adversaire n'est pas si simple». C'est dire que la participation effective des pays européens, des Etats-Unis et évidemment d'une force africaine paraît vitale pour pacifier un pays où les milices font la loi face à un président de transition (Michel Djotodia) complètement hors jeu.