Le Président par qui le scandale est arrivé a réussi à faire revenir Alger à de meilleurs sentiments par la magie d'un communiqué où il regrette mais ne s'excuse pas. Le président François Hollande a tenté, hier via un communiqué de l'Elysée, de minimiser l'incident diplomatique qu'il a lui-même provoqué par sa phrase malheureuse sur la situation sécuritaire en Algérie qui a eu l'effet d'une bombe. Sans doute pris de court par l'indignation en chaîne en Algérie comme en France, l'Elysée a réagi par doses homéopathiques pour sortir, à moindre frais, le président Hollande de cet embarras dont il se serait volontiers passé. Une voix «off» a ainsi glissé, hier, qu'il s'agissait d'une «plaisanterie légère qui pouvait viser n'importe qui dans n'importe quel pays et qui n'avait aucun sens particulier concernant l'Algérie». Pas suffisant pour stopper la polémique qui enflait des deux côtés de la Méditerranée. Les conseillers de Hollande ont alors pris leur plume non pas pour s'excuser de cette «plaisanterie» de mauvais goût, mais pour dénoncer une «polémique sans fondement». Le communiqué de l'Elysée souligne que le président français «exprime ses sincères regrets pour l'interprétation qui est faite de ses propos et en fera directement part au président Bouteflika». En clair, le président François Hollande regrette mais ne s'excuse pas du préjudice moral causé par sa déclaration sur le retour «sain et sauf» de Manuel Valls d'Algérie qu'il a prononcé lundi devant le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF). On retiendra du communiqué de l'Elysée que Hollande regrette moins ses propos que l'interprétation qui en a été faite en Algérie et en France. Tout se passe comme si sa petite phrase, qui a mis en boule les Algériens, était sujette à interprétation alors qu'elle était d'une clarté absolue. «Interprétation infondée», selon Hollande La présidence française fait, par ailleurs, valoir «l'amitié» de François Hollande avec l'Algérie et le «grand respect» qu'il a pour son peuple, pour plaider non coupable. «Chacun connaît les sentiments d'amitié que François Hollande porte à l'Algérie et le grand respect qu'il a pour son peuple, comme l'ont prouvé la visite d'Etat qu'il a effectuée en décembre dernier et les discours qu'il a prononcés», a indiqué l'Elysée dans un communiqué. Et cette profession de foi semble avoir fait revenir les autorités algériennes à de meilleurs sentiments, en témoigne la déclaration du ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, qui affirme avoir pris connaissance «avec satisfaction» du communiqué rendu public par le président François Hollande. Ce dernier n'a pourtant pas fait son mea-culpa puisqu'il s'est contenté de jeter la pierre à tous ceux qui ont bien compris et non interprété son propos clairement offensant. Mais qu'à cela ne tienne, Alger a passé l'éponge aussi rapidement qu'elle a fait savoir que les propos de Hollande représentaient une «moins-value à l'esprit qui enveloppe les relations algéro-françaises» et qu'ils constituaient une «improvisation périlleuse». Alger passe l'éponge Comme il fallait bien s'y tendre, le ton a sensiblement baissé à Alger et la promesse de Hollande d'en parler «directement avec le président Bouteflika», semble avoir suffi au bonheur du gouvernement qui n'a politiquement pas besoin d'une tension avec la France à quatre mois de l'élection présidentielle. Un appel téléphonique, hier, du MAE français, Laurent Fabius – qui bizarrement n'était pas du voyage de Jean-Marc Ayrault en Algérie –, a scellé les retrouvailles algéro-françaises après 24 heures de moue… C'est dire que l'incident est bien clos officiellement par le simple fait que Hollande l'ait mis sur le compte d'une «interprétation sans fondement». Il serait intéressant de voir comment les partis politiques au pouvoir en Algérie vont réagir à ce règlement à «l'amiable». La question se pose surtout pour le RND qui a eu des mots très durs à l'égard de la France et de son Président. «Ces propos (ceux de Hollande, ndlr) dénotent la haine vouée par les Français aux Algériens», a asséné son porte-parole, Nouara Saadia Djaafar. D'autres partis, notamment les islamistes ainsi que d'anciens moudjahiddine, ont appelé le gouvernement a réclamer des «excuses publiques» du président français. En France aussi, la gaffe de Hollande a servi de carburant à ses compteurs de gauche comme de droite pour le descendre en flammes alors qu'il est déjà en berne dans les sondages. «Mots déplacés», «dérapage verbal», «provocation», «ironie fétide» et même «nausée» sont sortis en rafales des bouches des responsables de la droite et de l'extrême gauche. Et à ce jeu, l'ex-ministre des Affaires européennes, Pierre Lelouche, du reste proche du CRIF, a porté le coup de grâce à la stature de François Hollande : «Il n'est pas encore rentré dans la fonction présidentielle.» «Interprétation infondée» alors ? Voyons…