Le journal officiel n° 68 du 31 décembre 2013 a publié la loi de finances pour 2014 dont le projet a été largement commenté par la presse. Voici, à présent, sous une série de publications, l'analyse détaillée du texte définitif. Celle de ce jour concerne la fiscalité directe. Celles à venir traiteront d'autres domaines de fiscalité et d'autres dispositifs de cette nouvelle loi de finances. Les jeunes promoteurs bénéficiaires d'avantages supplémentaires Qu'ils soient bénéficiaires de l'aide du «Fonds national de soutien à l'emploi des jeunes»(1) ou du «Fonds national de soutien au microcrédit»(2) ou de la «Caisse nationale d'assurance-chômage», les jeunes promoteurs reçoivent l'attention particulière du gouvernement qui souhaite l'essor de la petite et moyenne entreprise, qu'elle soit créée sous la forme individuelle ou en société, plus particulièrement dans les régions du Sud. L'article 13 du code des impôts directs et taxes assimilées qui prévoyait déjà une exonération de l'impôt sur les revenus, au titre des bénéfices industriels et commerciaux, pour une période de trois ans, contenait une disposition plus avantageuse pour ceux des jeunes promoteurs d'investissements qui développent, à titre individuel, des activités ou des projets éligibles à l'aide du «Fonds national de soutien à l'emploi des jeunes» ou du «Fonds national de soutien au microcrédit» ou de la «Caisse nationale d'assurance-chômage», dans une zone à promouvoir, portant l'exonération à six ans. La loi de finances pour 2014 étend, pour cette catégorie de promoteurs établis dans les zones à promouvoir, l'exonération de l'impôt sur le revenu à dix ans. La même disposition codifiée sous l'article 138 du code des impôts directs, consacrée aux sociétés fondées par des jeunes promoteurs, bénéficiaires des mêmes dispositifs d'aide cités précédemment, est modifiée de façon équivalente avec une extension à dix ans de l'exonération de l'impôt sur les bénéfices des sociétés. Dans la continuité des avantages à ces jeunes promoteurs, l'exonération de la taxe foncière, qui était a minima de trois ans et de six ans pour les constructions et additions de constructions installées dans des zones à promouvoir, est étendue à dix ans lorsque les constructions et additions de constructions sont installées dans des zones bénéficiant de l'aide du «Fonds spécial de développement des régions du Sud» ou à six ans pour celles installées dans des zones bénéficiant de l'aide du «Fonds spécial pour le développement des Hauts-Plateaux». C'est du moins ce que visait l'article 142 du code des impôts directs et taxes assimilées lorsqu'il régissait le bénéfice taxé à taux réduit des sociétés mais surtout lorsqu'en prémisse de l'instruction du chef du gouvernement de fin 2008, particulièrement orienté sur les bénéfices éligibles au transfert hors d'Algérie, la loi de finances complémentaire pour 2008, dans la série des mesures conservatrices liées à l'investissement, avait institué l'obligation de réinvestir la part des bénéfices correspondant aux montants des exonérations et réductions au titre de l'Impôt sur les bénéfices des sociétés (IBS.) L'avantage de réduction ou d'exonération d'impôt n'est pas sans contrepartie Cependant, les instructions du chef du gouvernement de décembre 2008 faisaient référence à l'exclusion des montants équivalents aux avantages fiscaux, douaniers et autres, tant pour les projets de régime général que de régime de la convention avant transfert des bénéfices hors d'Algérie. Pour correspondre au mieux au profil de cette instruction gouvernementale, la loi de finances complémentaire pour 2009 a étendu l'obligation de réinvestissement à tous les impôts, taxes, droit de douanes, taxes parafiscales et autres, avec application aux résultats en instance d'affectation à la date de publication de la loi de finances complémentaire pour 2009 ainsi qu'aux résultats de l'exercice 2010 et suivants. La pratique a démontré que cette mesure trouvait des difficultés de mesure de ces impôts, droits et taxes, tant par leur diversité que par leur nature. A titre d'exemple, la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est en réalité un avantage de flux de trésorerie, car en l'absence d'exonération, elle peut toujours être récupérée, le véritable avantage étant dans l'économie de décaissement, sans impact sur le résultat. De même que les droits de douanes, s'ils étaient payés se retrouveraient en charges directes ou amortis. La loi de finances pour 2014 institue une nouvelle rédaction de l'article 142 du Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées qui limite l'obligation de réinvestir à la part des bénéfices correspondant aux seules exonérations ou réductions de l'Impôt sur les bénéfices des sociétés (IBS) et de la Taxe sur l'activité professionnelle (TAP), accordées dans la phase d'exploitation. L'obligation de réinvestissement doit toujours s'exercer dans un délai de quatre ans à compter de la date de la clôture de l'exercice dont les résultats ont été soumis au régime préférentiel. Nouveau traitement des subventions d'équipements Particulièrement pour les entités soumises à l'Impôt sur les Bénéfices et bénéficiant de subventions, comme les Etablissements Publics Industriels et Commerciaux, la révision du traitement fiscal des subventions d'équipements devait s'aligner, de bon sens, sur le traitement comptable prévue par le Système Comptable Financier. Il semble que cela ne soit pas tout à fait le cas, car l'amendement de l'article 144 du Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées, consacré à ce traitement, nous livre une rédaction ambiguë à l'opposé du traitement consacré par la loi comptable. Il faut rappeler que le Système Comptable Financier considère que les subventions d'investissement sont comptabilisées en produits au même rythme que les coûts auxquels elles sont rattachées et que ces coûts correspondent, pour les immobilisations amortissables, au montant de l'amortissement. C'est, semble-t-il, dans cet esprit que la révision de l'article 144 du Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées a été proposée pour permettre de rattacher les subventions accordées, pour l'acquisition de biens amortissables, aux résultats imposables des entreprises bénéficiaires en fonction de la période d'amortissement des biens acquis. L'ancienne rédaction causait un décalage d'un an, puisque nonobstant le fait qu'elles n'étaient pas comprises dans les résultats de l'exercice en cours à la date de leur versement, ces subventions étaient rapportées, par fractions égales sur les cinq exercices suivants, sauf pour les équipements amortissables sur une durée supérieure, la durée d'amortissement l'emportant. La nouvelle rédaction renverse l'exercice de rattachement puisqu'il est écrit que les subventions d'équipement accordées aux entreprises par l'Etat ou les collectivités territoriales sont comprises dans les résultats de l'exercice en cours au moment de leur versement. Paradoxalement, la suite du texte précise que ces subventions sont rapportées aux bénéfices imposables des exercices suivants proportionnellement à leur exploitation, le montant restant des subventions étant rapporté aux bénéfices imposables, à compter du cinquième exercice au plus avec l'exception réservée aux acquisitions de biens amortissables où les subventions sont rapportées aux annuités d'amortissement. Si l'ambigüité de formulation se confirmait, l'administration fiscale aurait à trouver le moyen par lequel elle considérera recevable le traitement comptable approprié pour les déclarations au titre de l'Impôt sur les Bénéfices (IBS) de l'exercice clos le 31 décembre 2013 soumises en 2014. Recentrage du taux de l'Impôt sur les Bénéfices des Sociétés pour le secteur touristique Les taux d'imposition des bénéfices des sociétés avaient été révisés sous la loi de finances complémentaire pour 2008, selon la nature d'activité à laquelle ils se rapportent. C'est ainsi qu'un taux de 19% avait été retenu pour les activités de production de biens, le bâtiment et les travaux publics, ainsi que les activités touristiques ; le taux de 25% restant applicable aux activités de commerce et de services. Un an plus tard, la loi de finances complémentaire pour 2009 apportait la précision de ce qu'il convenait de retenir, pour l'application du taux de 19%, comme activités de bâtiment et de travaux publics et celles dites d'activités touristiques, précision faite que ces dernières concernaient la gestion des complexes touristiques et des stations thermales, exclusion faites des agences de voyages. La loi de finances pour 2014 reformule l'article 150-1 du code des impôts directs et taxes assimilées pour préciser que le taux de l'impôt sur les bénéfices des sociétés est fixé à 19% pour les activités de production de biens, le bâtiment et les travaux publics ainsi que les activités touristiques et les activités des agences de tourisme et de voyages activant dans le domaine du tourisme national et du tourisme réceptif. L'exclusion des agences de voyages reste de mise sous le même article puisque la nuance de l'extension du taux de 19% réside dans son application aux agences de tourisme et de voyages qui prestent dans les activités de tourisme pour les nationaux algériens ainsi que les activités de tourisme à l'adresse de visiteurs étrangers. Il reste à voir si la nuance sera facile d'application, d'autant qu'il est fort probable que les agences concernées soient amenées à distinguer en comptabilité les opérations exonérées. Autres mesures de fiscalité directe La loi de finances pour 2014 relève le montant de l'amende fiscale appliquée aux omissions ou inexactitudes relevées dans la déclaration prévue à l'article 162 du Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées, applicable aux entreprises étrangères qui exercent une activité temporaire en Algérie et qui n'y disposent pas d'une installation professionnelle permanente. Ces entreprises soumises à l'impôt sur les bénéfices, par voie de retenue à la source, interviennent le plus souvent dans le cadre de contrats de services ou contrats de management et doivent soumettre une déclaration annuelle qui récapitule les encaissements reçus et les retenues à la source opérées accompagnée d'un état détaillé des sommes versées par l'entreprise à des tiers à titre de travaux sous traités, d'études, de locations de matériels ou de personnel, des loyers de toute nature et d'assistance technique. Ce sont donc ces données, si elles s'avèrent erronées, qui exposent les entreprises déclarantes à cette amende fiscale qui sous l'ancienne rédaction de l'article 162 était de 10 DA à 100 DA, appliquée autant de fois qu'il est relevé d'omissions ou d'inexactitudes dans les documents et renseignements. L'amende fiscale est relevée dans un intervalle de 1,000 DA à 10,000 DA dans l'article Dans la série des relèvements de même portée, l'autre amende fiscale qui subsistait à 100 DA est celle qui est applicable en cas de défaut de la mention expresse dans l'acte, de la lecture des articles 57, 123 et 127, par les notaires qui reçoivent un acte d'obligation. Les notaires devront se rappeler que l'omission de cette mention leur coûtera désormais 1,000 DA. C'est ainsi que l'article 64 du Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées a été reformulé. Enfin, l'article 169 du Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées a été repris pour relever le plafond des subventions et dons, en espèces ou en nature, au profit des établissements et associations à vocation humanitaire à un montant annuel d'un million de dinars alors que l'ancienne rédaction limitait la déductibilité au montant annuel de deux cent mille dinars. Ce sont là les dispositions de fiscalité directe, contenues dans la loi de finances pour 2014, qui modifient le Code des Impôts Directs et Taxes Assimilées, sans apporter de grands bouleversements au système fiscal. Autant s'en réjouir, pour un temps seulement ; dans l'attente de la lecture de la suite de cette série d'analyses. (A suivre) -1) Régime ANSEJ : Agence nationale de soutien à l'emploi des jeunes -2) Régime ANGEM : Agence nationale de gestion du micro-crédit.-