La couverture accordée par les médias publics aux candidats à la présidentielle fait craindre aux formations politiques un parti pris en faveur du candidat du pouvoir. Quarante-cinq secondes, montre en main. C'est le temps qu'a consacré la Télévision nationale à l'annonce de la candidature de Ali Benflis. Même traitement avec les radios nationales, qui ont relégué l'information bien loin dans l'ordre des sujets diffusés ce jour-là. Au staff de campagne de l'ancien candidat malheureux à la présidentielle de 2004, on ne cache pas son amertume. «C'est clair que le traitement accordé à Ali Benflis est en deçà de l'événement, juge Lotfi Boumghar, chargé de la communication du candidat. Il est en deçà de la stature de l'homme et de ce qu'il peut représenter.» Pour le moment, on ne veut pas croire, au staff de campagne de Ali Benflis, à la volonté de minimiser la candidature de l'ancien Premier ministre. On préfère attendre. «On jugera sur les actes», précise Lotfi Boumghar. Pointées du doigt, la Télévision nationale et la radio publique réfutent les accusations. Les deux médias soulignent que, pour le moment, il ne s'agit que d'un candidat à la candidature. «Tous les candidats seront traités de la même façon, déclare un journaliste de la rédaction de l'ENTV sous le couvert de l'anonymat. La direction a décidé de ne pas réitérer ce qui avait été fait lors de la précédente présidentielle et qui consistait à diffuser, après le journal de 20 heures, l'intégralité des discours des candidats.» Pour Malya Behidj, directrice de la Chaîne III, les candidats ne sont pour l'instant que des prétendants à la présidentielle tant que le Conseil constitutionnel n'a pas validé les candidatures : «Nous leur accordons deux passages dans les plus importants rendez-vous de l'information en diffusant leur déclaration officielle et en revenant sur leur programme, je pense que c'est équitable.» Mais pour les candidats déclarés à la présidentielle, beaucoup estiment que ces bonnes intentions affichées par les responsables des médias publics cachent en réalité une volonté de marginaliser leur candidature, alors que des assurances sur la transparence du scrutin et un accès aux médias publics sont annoncés par le gouvernement. Pour l'ancien Premier ministre et candidat à la présidentielle Ahmed Benbitour, il y a une volonté du pouvoir de ne pas accorder plus de temps d'antenne pour empêcher les Algériens de connaître la réalité de la situation du pays. «Il y a une volonté manifeste des médias publics à ne pas faire passer mon message, déclare Ahmed Benbitour. Je suis interdit de passage sur tous les canaux officiels et je le dénonce. On me refuse un droit fondamental qui est de pouvoir m'exprimer à travers des canaux qui sont censés être ouverts à tous. On ne peut dans ces conditions parler de démocratie. Je suis convaincu que ces médias prendront position pour le candidat du pouvoir, le moment venu, comme ils l'ont toujours fait.» Mohamed Hadef, président du Mouvement national de l'espérance (MNE) et candidat à la présidentielle, regrette aussi le peu de temps qui lui a été accordé par les médias publics lors de l'annonce de sa candidature. Il estime qu'il est primordial que ces médias adoptent une «attitude d'impartialité». «Les médias publics ont le devoir d'informer les citoyens sur les candidats déclarés, estime Mohamed Hadef. C'est la meilleure manière d'intéresser les Algériens à la présidentielle et d'éviter l'abstention.»