Le bras de fer entre les avocats de la cour d'Alger et la présidente de cette juridiction continue. Le boycott de la session criminelle par les robes noires est entré dans sa cinquième journée, sans que les deux parties n'arrivent à un arrangement. Les avocats s'obstinent à déserter les salles d'audience tant que les noms des magistrats désignés ne sont pas rendus publics, alors que la présidente de la cour, par intérim, persiste à affirmer qu'il n'existe aucun texte de loi qui l'oblige à le faire. Cette situation a eu pour conséquence le renvoi de toutes les affaires programmées durant cette semaine à une date ultérieure pénalisant ainsi les justiciables, notamment ceux en détention provisoire, dont les procès risquent d'être reportés à la prochaine session criminelle, prévue vers la fin de septembre prochain. Rencontrés au tribunal d'Alger, de nombreux avocats ont réaffirmé leur position de ne reprendre les plaidoiries qu'une fois leurs revendications concrétisées. Me Chorfi s'est interrogé sur les arrière- pensées de la cour, en refusant de communiquer la liste des magistrats désignés pour siéger au tribunal criminel. « Comment va-t-on exercer notre rôle de contrôle de la régularité de la procédure si nous ne connaissons pas les noms des magistrats ? S'il y a suspicion légitime, la défense ne peut même pas récuser le magistrat le jour même de l'audience », a-t-il déclaré. D'autres avocats ont dénoncé la position de la présidente de la cour, en la qualifiant d'entrave, voire même de violation au droit de la défense. « Comment allons-nous dénoncer la corruption ou la partialité de certains juges, si nous n'avons même pas le droit de savoir qui siégera à l'audience. Tout comme nous avons le droit de récuser les témoins, dont l'identité est connue, nous avons la possibilité de rejeter la désignation d'un magistrat s'il y a des preuves qui peuvent compromettre sa neutralité dans un procès », ont-ils déclaré. Ils ont fait état du non- respect par le président de la cour de la procédure de jugement, en affirmant que les engagements de cette juridiction consistant à remettre une copie complète (de la procédure) à la défense n'ont jamais été honorés. « La copie que nous recevons au niveau du bâtonnat est squelettique en informations, comparativement à celle remise au représentant du ministère public et aux magistrats d'assises. Nous nous retrouvons souvent dans les audiences avec des dossiers maigres, qui parfois sont loin de ceux détenus par le tribunal, ce qui constitue une grave entrave au droit à la défense. Dans pareille situation, l'avocat ne peut assurer sa mission puisque privé des instruments qui peuvent renforcer ses moyens de défense », a déclaré Me Chorfi. En tout état de cause, cette situation semble être dans une véritable impasse puisque aucune des deux parties ne veut reculer sur ses positions, pénalisant ainsi les nombreux détenus qui attendent leurs procès avec impatience.