La tentative de José Luis Zapatéro de se débarrasser du dossier encombrant du Sahara-Occidental en rejetant la responsabilité de son règlement sur le couple Rabat-Alger n'a pas fait long feu. La pression de la rue espagnole « fidèle aux Sahraouis » et le niet catégorique de l'Algérie ont convaincu le successeur de Aznar de reprendre à son compte les positions traditionnelles de l'Espagne sur la question. Après avoir endossé le costume des adeptes d'« un dialogue direct entre le Maroc et l'Algérie », José Luis Zapatéro a fini par reconnaître, en effet, la pertinence du plan Baker. Arrivé au pouvoir triomphalement, José Luis Zapatéro donne aujourd'hui l'impression de vouloir tenter de se racheter après la déception et l'indignation suscitées par sa position au sein de la société espagnole. Celle-ci se sent, en raison du statut d'ancienne force colonisatrice au Sahara-Occidental, coupable du malheur des Sahraouis. Le gouvernement de José Luis Zapatéro, qui a donné l'impression, à ses débuts, d'avoir misé sur le dialogue direct entre Rabat et Alger sur un simple coup de tête (pour marquer sans doute sa différence avec Aznar), prend aujourd'hui son temps pour mieux saisir l'importance du dossier sahraoui. Outre le recentrage de sa position, le regain d'intérêt du nouveau gouvernement espagnol pour la situation au Sahara-Occidental se vérifie à travers la reprise des visites des officiels espagnols dans les camps de réfugiés sahraouis. Celles-ci devraient d'ailleurs se poursuivre puisque la secrétaire d'Etat espagnole à la Coopération internationale, Leire Pajin, a annoncé hier qu'elle comptait aussi visiter ces camps en septembre prochain. Son déplacement fait suite, rappelle-t-on, à ceux effectués, en juin et en août derniers, par le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, Bernardino Léon. M. Léon avait été reçu au cours de ces deux visites par le président de la RASD, Mohamed Abdelaziz. L'autre marque de la sensibilité retrouvée de Madrid pour la question du Sahara-Occidental est l'augmentation de l'aide humanitaire accordée annuellement aux Sahraouis. Recentrage L'alignement inattendu de l'Espagne sur les positions françaises dans le dossier sahraoui a eu pour effet de donner de l'assurance au Maroc. Convaincu que la partie était sur le point d'être gagnée, le royaume a multiplié les manœuvres pour faire porter à l'Algérie le chapeau de la responsabilité dans le blocage du règlement du conflit sahraoui et de la construction de l'ensemble maghrébin. L'une de ces manœuvres a consisté à prendre la décision de supprimer le visa imposé unilatéralement en 1994 aux ressortissants algériens sans en aviser les autorités algériennes. Ce coup médiatique - qui a failli avoir raison des relations entre les deux pays dont la dynamisation était pourtant inscrite clairement dans un cadre bilatéral -était destiné à renforcer l'image d'un Maroc soucieux de l'avenir du Maghreb et de ses relations avec l'Algérie. Il n'a pas fallu, cependant, attendre beaucoup de temps pour connaître les motivations à l'origine de la décision du roi Mohammed VI. En tendant la main à Alger, le Maroc n'a pas cessé, entre-temps, son « lobbying » pour faire admettre le principe de faire transiter le règlement du problème du Sahara par un dialogue entre lui et l'Algérie. Pour y parvenir, les autorités marocaines comptaient beaucoup sur les pressions françaises et espagnoles. Au plan du factuel, les deux sévères mises au point (la dernière date de mercredi), à travers lesquelles Alger a réaffirmé son attachement à la légalité internationale et le recentrage éclair opéré par José Luis Zapatéro, signifient l'échec du « plan marocain » pour le Sahara-Occidental et une rechute de Mohammed VI dans l'isolement international. En remettant les pendules à l'heure, les autorités algériennes ont voulu aussi enterrer définitivement la rumeur, entretenue jusque-là, présentant une partie importante du pouvoir algérien favorable à une solution négociée avec le royaume marocain. La quarantaine du Maroc pourrait s'avérer totale si l'information évoquant une entente entre Paris et Alger concernant le dossier sahraoui venait à se confirmer.