Le projet du siècle serait-il en train de virer au scandale du siècle ? Tout porte à le croire. Entre surcoûts, malfaçons et retards, le projet de l'autoroute Est-Ouest multiplie les revers et les accrocs. Dernier épisode en date de cet interminable soap : le consortium japonais Cojaal risque fort de voir son contrat résilié d'ici une semaine. C'est donc après de longs mois de tergiversations et de conflits, sur fond de revendications financières, que l'Agence nationale des autoroutes (ANA) se décide à sévir. Il est vrai que les travaux sur le tronçon Est de l'autoroute s'arrêtent pour la énième fois. Aujourd'hui, il reste à réaliser les 87 kilomètres qui traversent la wilaya d'El Tarf avec le tronçon de près de 11 km dans le Parc national d'El Kala. Les travaux sur ce tronçon sont interrompus depuis août 2011, arrêt justifié à l'époque par la nécessité d'orienter tous les moyens vers Constantine. Néanmoins, si l'ANA décide de faire usage des grands moyens aujourd'hui, c'est pour mettre fin aux multiples revendications d'ordre pécuniaire avancées à chaque fois par Cojaal. En 2013, les Japonais avançaient déjà cet argument pour justifier l'arrêt du chantier sur le tronçon Skikda-Constantine. Si les représentants du gouvernement insistaient à l'époque sur le fait que Coojal a été payé et que toutes les contraintes techniques et financières ont été levées, l'entreprise de réalisation affirmait que le paiement des avenants n'a pas été entièrement respecté. Quoi qu'il en soit, l'exigence de Cojaal pour le paiement de factures et pour honorer des engagements financiers, qui restent aujourd'hui pour le commun des mortels encore flous, vire aujourd'hui au chantage. L'arrêt des chantiers sur ce dernier tronçon n'est en fait que le dernier développement d'un chantier émaillé par les problèmes et les scandales. L'affaire de corruption ayant éclaté en 2009, l'effritement du tronçon Bouira-Lakhdaria, l'effondrement du tunnel de Djebel Ouahch et enfin le glissement de terrain sur le tronçon Tlemcen-Sidi Bel Abbès ne sont que les hauts faits d'un chantier devenu cauchemardesque et qui n'est toujours pas entièrement réceptionné, 8 ans après son lancement. Un projet qui restera dans les annales de la mauvaise gestion. Pourtant, à la signature des contrats avec les entreprises de réalisation, en 2006, le ministre des Travaux publics de l'époque, Amar Ghoul, affirmait que le choix s'était porté sur le plus disant, fait exceptionnel par rapport à la tradition en matière de marchés publics en raison de la qualité et des délais proposés (seulement 40 mois) et dont le respect était garanti par les soumissionnaires retenus. Quelques années après on se retrouve avec une autoroute de mauvaise facture, non encore achevée et, qui plus est, l'une des plus chères au monde. Une récente enquête d'El Watan révélait ainsi que le coût de cette autoroute non achevée et non encore dotée de tous les équipements est estimé à 9,95 millions de dollars le kilomètre, loin et largement au-dessus des 2 à 3 millions d'euros que coûte le kilomètre d'autoroute en Espagne, au Portugal, au Danemark et en Suède.