Au cinquième jour de la vaste agression israélienne contre la population de la bande de Ghaza, le scénario sanguinaire n'a pas changé Des avions de chasse de type F16 lancent du matin jusqu'au soir des raids meurtriers. Ghaza De notre correspondant Les drones israéliens, munis de roquettes air-sol et de caméras, ne quittent plus le ciel de Ghaza, traquant et massacrant au quotidien des civils.Ils ciblent des personnes ou des groupes de citoyens que le soldat chargé de les téléguider à partir de leur base en Israël choisit parfois selon son désir, peut-être selon son humeur. Les histoires dramatiques relatées par certaines victimes de ces redoutables machines plaident en faveur de cette hypothèse. Du cynisme et de la cruauté à l'état pur. C'est ce qui s'est produit dans le quartier Tell El Hawa, à Ghaza, pour Anas Abou Elkas, un pharmacien de 32 ans, père de deux enfants, n'ayant aucune relation avec les factions palestiniennes armées pourchassées par la machine de guerre israélienne. Sorti sur son balcon, mercredi après le f'tour, pour fumer une cigarette loin de ses deux petits, Anas Abou Elkas n'a pas eu le temps de la terminer. Un drone israélien a ciblé le balcon en question, tirant trois roquettes. Le jeune pharmacien, qui a perdu son père et sa mère au cours d'un bombardement israélien durant la guerre de l'hiver 2008-2009, est mort sur le coup. Combien d'enfants et d'adolescents ont péri sous les roquettes des drones parce qu'ils ont osé jouer au ballon dans leur quartier ? Combien de groupes de voisins ont été ciblés parce qu'ils avaient osé fumer le narguilé et boire du thé sur le trottoir, près de chez eux ? Les soldats israéliens chargés de guider les drones donnent l'impression de jouer à un jeu vidéo, à la différence que les victimes de ce jeu sont bien réelles. Ce sont des êtres humains et non des personnages virtuels. Il s'agit de gens dont la disparition a fait mal à leurs proches, à leurs amis. Nuée de machines tueuses Au moment de la rédaction de cet article, huit personnes, parmi lesquelles des enfants et des adolescents, ont été tuées par une roquette tirée par un drone dans une rue du quartier Cheikh Redouane, à l'ouest de la ville de Ghaza. Dotées d'une grande précision, ces machines tueuses sont en train de devenir la bête noire des Ghazaouis. Lorsqu'elles ne les tuent pas, elles les empêchent de regarder la télévision : elles émettent des ondes qui causent des perturbations dans la diffusion des images. L'autre caractéristique qui empoisonne la vie des citoyens est le bourdonnement très spécial et discontinu des moteurs des drones. En plus de donner l'impression d'être sous une surveillance non stop, il met les nerfs à vif et empêche de trouver le sommeil, même si l'on est fatigué. Le dernier bilan provisoire de ces cinq jours de folie meurtrière est de 128 Palestiniens tués et près de 1000 autres blessés. Les maisons des Ghazaouis continuent d'être ciblées par les avions de chasse. Plus de 300 ont été entièrement démolies et plusieurs milliers ont été partiellement endommagées. Conséquence : des milliers de Palestiniens se retrouvent sans abri. M'hamad Abou Leïla, un jeune homme dont la maison familiale, dans le quartier Ennasr à Ghaza, a été entièrement démolie par une roquette israélienne, se souvient comment sa famille a dû fuir précipitamment pour échapper aux bombes. «Heureusement que nous avons pris la décision de quitter notre maison avant qu'elle ne soit bombardée. Nous avons aussi incité nos voisins à faire de même. Jeudi matin, ça n'a pas raté. Vers 7h, une roquette tirée depuis un drone a tout détruit. Heureusement, personne n'a été blessé. Nous sommes maintenant une quinzaine de SDF», raconte à El Watan M'hamad, qui pleure la perte du «fruit de toute une vie de labeur». Une opération militaire qui sera longue Visiblement le cauchemar des Ghazaouis sera encore long. Le ministre israélien de la Guerre, Moshe Ayalon, a déclaré, hier matin, que «l'armée israélienne se prépare à de longs jours de combat». Ayalon, qui a omis de signaler que les principales victimes des raids de ses avions sont des femmes, des enfants et des personnes âgées, a soutenu que «le mouvement Hamas a payé et continue de payer le prix». Le ministre israélien a ajouté que «l'opération militaire se poursuivra jusqu'à la réalisation de ses objectifs principaux : frapper les structures de base du Hamas et des autres factions», qu'il a qualifiées de «terroristes». Il a indiqué que cette opération «finira avec le retour de la sécurité pour les citoyens israéliens et l'arrêt des tirs de roquettes». L'armée israélienne prépare une opération terrestre en convoquant plus de soldats réservistes et en tassant des centaines de blindés et de chars de type Merkava à la frontière avec l'enclave palestinienne. Dans ce contexte, Israël aurait permis à 800 étrangers de quitter la bande de Ghaza. L'UNRWA (agence onusienne pour l'aide aux réfugiés palestiniens) a déclaré être prête à accueillir 50 000 réfugiés en cas d'invasion israélienne terrestre. Bien que la position officielle israélienne reste ambiguë sur cette question d'offensive terrestre, le départ des étrangers et la déclaration de l'UNRWA sur sa disposition à accueillir les citoyens habitant le long de la frontière avec l'Etat hébreu laisse penser qu'elle aura bien lieu. Surtout que toutes les tentatives de médiation pour un cessez-le-feu ont échoué. Au niveau de la rue palestinienne, aucun signe de déplacement de population n'est visible. En plus des roquettes tirées en direction d'Israël, les résistants palestiniens ont attaqué à deux reprises des blindés israéliens postés à la frontière. Les deux attaques (vendredi et hier) menées avec des roquettes antichars de type Kornet ont fait des blessés parmi les soldats israéliens. Un message clair indiquant aux responsables israéliens que leur opération terrestre ne sera pas une promenade de santé.