Dix mois après son retrait de la bande de Ghaza, qu'elle a occupée durant plus de 29 ans, l'armée israélienne a entamé depuis mercredi soir une réoccupation de la partie nord de ce territoire palestinien. Les dizaines de chars Merkava stationnés à la ligne de frontière ont commencé une incursion en profondeur dans le nord de la bande de Ghaza, couverts par des hélicoptères d'assaut de type Apache et des drones (avions espions sans pilote). Dès mercredi soir, après avoir reçu le feu vert du gouvernement, les chars et les bulldozers israéliens ont avancé vers la région de Beit Lahia, dans une tentative de créer une zone de sécurité, afin de mettre un terme aux tirs de roquettes artisanales contre le territoire hébreu. L'incursion a été particulièrement sanglante. Pas moins de 26 Palestiniens, civils et résistants, ont été tués et plus de 100 autres ont été blessés dont certains gravement, durant les premières 24 heures de cette nouvelle agression israélienne. Cette offensive terrestre, dans laquelle les troupes israéliennes utilisent de très gros moyens, vient dans le cadre de l'opération militaire entamée depuis plus d'une semaine dans la bande de Ghaza, suite a la capture du caporal Gilad Shalit, et la mort de deux autres soldats au cours d'une attaque d'un poste militaire israélien à Karm Salem, en territoire israélien, près de la frontière avec l'Egypte. Contre sa mise en liberté, les résistants palestiniens qui détiennent le soldat israélien exigent la libération des femmes et des enfants palestiniens détenus dans les prisons israéliennes, ce que refuse catégoriquement le gouvernement israélien. « Nous ne négocierons pas avec les terroristes. Nous agirons avec toute la force nécessaire mais nous ne céderons pas au chantage », a dit Olmert, le Premier ministre israélien. « Les pluies d'été » nom de code attribué à l'opération militaire israélienne qui porte depuis mercredi un autre nom « l'épée de Gilad », a commencé par des raids aériens contre l'infrastructure de base. La principale centrale électrique qui fournit l'énergie à 70% de la superficie de la bande de Ghaza et trois ponts servant à relier le nord au sud de ce territoire ont été détruit durant les premières heures. Depuis, plusieurs édifices publics dont le siège du Premier ministre palestinien, Ismaïl Haniyeh, le ministère de L'Intérieur, l'université islamique à Ghaza-ville, une école, ainsi que plusieurs tronçons de route ont été ciblés par l'aviation israélienne, faisant vivre la population dans une atmosphère de guerre véritable. Cette population, privée actuellement de courant électrique et d'eau potable à longueur de journée, est la principale proie de la machine de guerre israélienne. Dans la région de Beit Lahia, les combats font rage entre les résistants palestiniens de tout bord et les blindés israéliens. La majeure partie des résistants et des civils tombés au champ de bataille ont été atteint par des éclats de missiles airs-sol, tirés à partir des hélicoptères ou des drones qui couvrent les chars israéliens. Les résistants palestiniens ont réussi à détruire un char et tuer un soldat israélien au cours des accrochages armées qui ont eu lieu à l'ouest de la ville de Beit Lahia. « Dans certains secteurs, nous avons rencontré une résistance acharnée des terroristes », a déclaré à la presse, sur place, le commandant de la région militaire sud d'Israël, Yoav Galant. « Notre objectif est d'éloigner les tirs de Qassam, de faire en sorte que ceux qui les tirent en payent le prix fort au point qu'ils y renoncent », a-t-il ajouté. Mais il faut signaler qu'au cours de l'opération militaire israélienne, les résistants ont pu lancer, jeudi, une roquette de type Qassam vers la ville d'Ashkelon, atteignant une centrale électrique. L'atteinte de cette zone israélienne, peuplée de 200 000 personnes, avait été qualifiée de très grave et dépassant toutes les lignes rouges. Le feu vert à l'offensive terrestre avait été attribué après la tombée, mardi, de la première roquette au cœur de cette ville. Les chars israéliens qui, dans leur avancée, ont saccagé des centaines d'hectares de terres agricoles de la région ont réoccupe les anciennes colonies israéliennes surplombant la région de Beit Lahia. Le Premier ministre palestinien issu du Hamas, Ismaïl Haniyeh, lui même considéré comme une cible potentielle, qui avait dénoncé auparavant une « punition collective », a de nouveau appelé, jeudi soir, les pays arabes et la communauté internationale à intervenir pour mettre fin à l'agression israélienne. « Il faut que les pays arabes et la communauté internationale interviennent pour mettre fin à cette guerre déclarée par Israël », a dit Haniyeh, parlant de « crime contre l'humanité ». « Israël doit également cesser de détruire les ponts, les infrastructures et les centrales électriques », a-t-il ajouté lors d'une visite aux blessés à l'hôpital Shifa de Ghaza. Dans le cadre de ce qui pourrait être qualifié d'un début de pression de l'opinion générale israélienne sur son gouvernement, Noam Shalit, le père du soldat détenu par les résistants, s'est pour la première fois exprimé en faveur d'un éventuel échange de son fils contre des prisonniers palestiniens détenus par Israël. Par ailleurs, en Cisjordanie, une jeune palestinienne a été tuée au cours d'une incursion de l'armée israélienne dans la ville de Jenine où trois chefs locaux de trois factions palestiniennes armées ont échappé a une tentative d'assassinat. Enfin, 27 ministres et députés palestiniens du Hamas enlevés par Israël ont comparu devant deux tribunaux militaires israéliens, en vue de la prolongation de leur garde à vue. Le vice-président du Conseil législatif palestinien (CLP, Parlement), Hassan Khreicheh, a été arrêté jeudi par l'armée israélienne à son retour de l'étranger, selon des responsables des services de sécurité palestiniens. Que ce soit à Ghaza ou en Cisjordanie occupée, Israël semble décidé à aller jusqu'au bout dans sa guerre totale contre les Palestiniens. Le but final est de les voir se plier aux exigences israéliennes, un souhait difficile à réaliser car les Palestiniens n'ont désormais plus rien à perdre.