Troisième soirée du Festival international de musique diwane, quand l'âme du diwan rencontre les esprits du vaudou… Prenez un jeune Maâlem surdoué. Ajoutez un génial jazzman aux idées folles. Mélangez le tout dans un chef-d'œuvre de Jimi Hendrix. C'est la recette miracle du Voodoo Child survitaminé interprété par Nguyên Lê et Maâlem Lahbib. Sorti en 1968, ce titre est un des derniers de Hendrix. Condensé de rythm'n'blues psychédélique et de retour aux sources, Voodoo Child est une sorte de testament musical laissé par le guitariste afro-américain. La fusion proposée lors du concert de dimanche au théâtre de verdure (Bois des Arcades) mêlait l'hyper modernité d'un Ngyên Lê carburant aux effets numériques, et les sonorités «roots» de Maâlem Lahbib, redoutable au guembri. Ce genre d'expérience est pourtant périlleux et aboutit souvent à des mélanges improbables ou à des rencontres artificielles (le festival l'a souvent appris à ses dépens…). Mais ce soir, la fusion a bien fonctionné. Ngyên Lê, qui a longuement collaboré avec Karim Ziad, a su aérer son arrangement pour laisser place à de longs solos de guembri. Le blues a donc rencontré le diwan dans ce carrefour des arts qu'est notre continent. Rien de plus naturel que ces musiques forgées dans la souffrance des esclaves d'Afrique subsaharienne et développées diversement selon les cultures d'adoption se trouvent de nouveau des affinités. Avant ce final fusionnel, le public a assisté à deux prestations aux styles contrastés. Première partie, Maâlem Lahbib et ses compagnons de Jil Essaed ont montré l'étendue de leur maîtrise du diwan originel. Maîtrise qui leur a valu le deuxième prix du dernier festival national de diwan. Le Maâlem arbore une puissante voix roque et une présence scénique incontestable. Ces jeunes musiciens d'Oran méritent bien le nom de «génération montante» qu'ils s'attribuent. Ngyên Lê a dévoilé, quant à lui, une excitante expérience intitulée Celebrating Jimi Hendrix. Qu'aurait fait Hendrix s'il disposait des outils qu'offre aujourd'hui le numérique ? Ce mythique guitariste avait tenté toutes les expériences sur son instrument (la légendaire Fender stratocaster), y compris de jouer avec les dents, de brûler sa guitare ou de la pulvériser contre les amplis… Le guitariste français d'origine vietnamienne se propose de poursuivre l'expérimentation en profitant des possibilités illimitées de la musique assistée par ordinateur. Le laptop s'ajoute à la pédale wah-wah pour une exploration de l'univers psychédélique hendrixien. Gipsy Eyes, Axis Bold As Love, I Don't Live Today… Loin de se contenter de simples reprises agrémentées, Ngyên Lê s'approprie totalement ces standards dans des arrangements riches en sonorités inattendues et harmonies audacieuses. Le festival se poursuit jusqu'au 14 août avec, ce soir, Maâlem Abdeslem Alikkane et Toyour Gnawa, suivis des rockeurs chinois de Tang Dynasty.