Le président de la République n'hésite pas à mettre la main dans les caisses du Trésor public pour entretenir le train de vie des dignitaires du régime et autres hauts fonctionnaires de l'Etat. A cet effet, Abdelaziz Bouteflika a signé un décret présidentiel, le 8 juillet passé, portant l'allocation d'un crédit de 1,5 milliard dinars (10 millions d'euros) destiné à la résidence d'Etat du Sahel (Club des Pins et Moretti) pour l'année 2014. Publié avant-hier au Journal officiel, le décret stipule qu'il «est ouvert, sur 2014, un crédit de 1,502 milliard de dinars (1 502 000 000 DA) applicable au budget de fonctionnement des services du Premier ministre et au chapitre n°44-01 & 769, “Contribution à la résidence d'Etat du Sahel“». Une faramineuse somme annuelle pour gérer des villas et des chalets mis gracieusement à la disposition, depuis des années, à des ministres en exercice et à la retraite, des directeurs d'entreprise publique, des ambassadeurs et patrons d'«organisations de masse» et des «amis». Certaines villas de la résidence ont été cédées aux privilégiés de la République pour des sommes modiques dans les années quatre-vingt-dix. De nombreux ministres, actuels et anciens et cadres de l'Etat «squattent» encore des chalets et ne s'acquittent même pas des frais de location. Gérée dans l'opacité, cette «cité verte» inaccessible coûte cher au contribuable, alors que son existence n'est en aucun cas justifiée. Si durant les années de terrorisme, cette structure était nécessaire pour mettre de hauts responsables politiques et militaires hors de portée des groupes terroristes, maintenant que «la paix est retrouvée», comme l'assure le discours officiel, rien ne peut justifier le maintien de cette «zone verte» qui connaît depuis quelques années une extension. De nouveaux chantiers sont ouverts pour la réalisation d'un centre international de conférences, confiée au constructeur chinois China State Construction Engineering Corporation, une compagnie qui a réussi à obtenir beaucoup de marchés de grands travaux en Algérie dans des conditions pour le moins discutables. Que va-t-on faire du Palais des nations ? Sera-t-il détruit ? Rien n'est moins sûr. Gérée par un Etablissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) sur lequel trône l'indéboulonnable Hamid Melzi, en poste depuis 1997, la résidence d'Etat ne révèle jamais ses plans. Haut lieu de l'extravagance du pouvoir, où se tiennent les réunions clandestines des pachas de la «république» pour décider du sort du pays, la résidence d'Etat incarne l'état d'un pays à la dérive. Elle concentre toutes les tares et les folies d'un régime assis sur un énorme matelas financier. Maître des lieux, l'un des hommes les mieux informés des affaires «privées» des dignitaires du régime, Hamid Melzi est devenu au fil des ans un personnage «indispensable» pour certains segments du pouvoir mais «encombrant» pour d'autres.