Les terroristes du Daech ont poussé les populations syriennes à l'exode, en s'emparant d'au moins 64 villages de la région de Aïn Al Arab, depuis la semaine dernière. Les guerres n'empêchent pas le business. Même entre ennemis. Dans le cas de l'Irak, il semble même que les «canaux» commerciaux entre certaines capitales occidentales et l'Etat islamique (EI), le groupe terroriste que la communauté internationale est censée combattre, se soient renforcés ces derniers jours. La raison n'est pas difficile à deviner. Daech contrôle actuellement 11 champs pétroliers dans le nord de l'Irak et dans la région de Raqqa, en Syrie. Et tout ce beau monde compte bien en profiter jusqu'à la dernière goutte, surtout que ce pétrole est très bon marché. Le site d'information Atlantico précise, à ce propos, que l'Etat islamique commercialise son pétrole entre 25 et 50 dollars le baril (il est à moins de 100 dollars sur le marché) par le biais de réseaux de contrebande qui sévissent en Jordanie, en Turquie et au Kurdistan. Certains spécialistes n'excluent pas l'idée qu'une partie du brut écoulé sur le marché parallèle soit directement acheminée ensuite vers les Etats-Unis et l'Europe. Cette information pourrait d'ailleurs expliquer, en partie, pourquoi les prix du brut ont connu une baisse subite sur le marché mondial, la semaine dernière.La Tchèque Jana Hybášková, ambassadrice de l'Union européenne en Irak, a confirmé, selon Anadolu News Agency — que reprend d'ailleurs le journaliste français Gilles Munier (spécialiste de l'Irak) sur son blog — que des tankers parviennent dans des pays européens avec des cargaisons de pétrole achetées auprès du Daech. La diplomate européenne a refusé, cependant, d'en dire plus ou de donner la liste des pays concernés. Ce n'est pas tout. A l'heure actuelle, rien ne prouve que certains pays, connus de longue date pour leur soutien militaire aux groupes extrémistes et terroristes, aient réellement cessés d'aider l'EI. Plus de 130 000 Syriens fuient en Turquie Concernant spécialement les livraisons d'armes aux Kurdes, l'ambassadrice européenne en Irak a affirmé qu'il était impossible de vérifier si les véritables destinataires étaient bien les Peshmerga ou «des organisations terroristes kurdes». Par la même occasion, Jana Hybášková estime qu'un soutien à l'indépendance du Kurdistan irakien provoquerait «l'effondrement complet du Moyen-Orient». Tous ces éléments troublant permettent de mieux comprendre la raison pour laquelle la guerre contre l'EI reste si inefficace sur le terrain. Y a-t-il vraiment une volonté d'en finir avec Daech ? Les civils syriens en doutent étant donné que, malgré les bombardements occidentaux contre ses positions, le groupe terroriste dirigé par le tout aussi sinistre qu'énigmatique Al Baghdadi continue de conquérir des territoires dans le nord de la Syrie. Pour fuir justement la percée de Daech, qui bute sur la résistance kurde autour de la ville stratégique de Aïn Al Arab, plus de 130 000 Syriens ont quitté en catastrophe leur pays pour se réfugier en Turquie. Les terroristes du Daech ont poussé ces populations à l'exode après la prise d'au moins 64 villages de la région de Aïn Al Arab (Kobané en kurde) depuis la semaine dernière. Les djihadistes veulent prendre la troisième ville kurde de Syrie pour s'offrir le contrôle total d'une longue bande de la frontière syro-turque. Pour repousser cet assaut, le mouvement armé kurde turc PKK a exhorté une nouvelle fois, hier, ses partisans à aller se battre en Syrie. Aïn Al Arab avait jusqu'alors été relativement épargnée par le conflit en Syrie et quelque 200 000 déplacés syriens y avaient trouvé refuge, d'après l'ONU. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), des Syriens non kurdes se sont joints aux combattants kurdes pour défendre la ville, où l'ONG estime à au moins 60 le nombre de morts des deux côtés. Au vu de l'évolution de la situation, la guerre qui fait actuellement rage pour le contrôle de la région stratégique risque certainement de déboucher sur un bain de sang. Surtout que l'odeur du pétrole s'en dégage abondamment.